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Critique de Erik35


SANS JAMBON SEC, LA QUÊTE, TU ACCOMPLIRAS...

Kaamelott, c'est un peu comme la foi : ça ne s'explique pas. de fait, entre les aficionados capables d'en sortir des tirades entières d'un côté et ceux que cette série désormais célèbre laisse totalement froids, il n'existe pas réellement de juste milieu. Mais lorsqu'un nouvel album - attendu depuis 2013, rien que ça!, parait, inutile de préciser que les fans, auxquels votre humble serviteur appartient, se précipitent sur cette bonne affaire ! Et le meilleur, c'est qu'il n'y a pas à regretter cette longue, très longue attente : le résultat est pour le moins excellent.

Parce qu'on ne change surtout pas une équipe qui ne gagne pas - sauf des fous rires - nous retrouvons ici la fine fleur de Kaamelott :

- L'éminent Père Blaise, habituellement responsable de noter les ordres du jour de la table ronde, et que, d'un commun accord (sauf le sien) tout le monde a chargé d'être le cartographe de l'équipe.

- Léodagan, fidèle à lui-même, toujours critique, toujours gueulard et balançant vanne sur vanne, "fion pour fion", pour prendre un vocable plus léodaganien...

- Lancelot, profession lèche-botte royal, ce qui a fâcheusement tendance à courir sur le haricot de notre bon roi ; premier de classe, aussi, ce qui a fâcheusement tendance à courir sur le haricot de tout le monde. Est bien moins indispensable qu'il peut lui-même le penser (si ce n'est à jouer les Cassandre)...

- Bohort, pétochard en chef (et pourtant, le Père Blaise ainsi que Merlin font ce qu'ils peuvent pour être à niveau), l'homme qui a la trouille du moindre pet de travers (et des lapins adultes, souvenez-vous), celui qui pense que le simple fait de vivre, c'est de l'inconscience...

- Merlin : le pire magicien à l'Ouest de Kaamelott... À l'Est aussi, d'ailleurs. Quant au Nord et au Sud, c'est pas mieux. De toute manière, l'est, l'ouest, selon comme on est tourné (fonctionne avec droite et gauche)... Malgré son apparente bonhomie et son inutilité crasse, Merlin est cependant suffisamment langue de vipère pour que personne, même parmi les plus stupides des compagnons d'Arthur, ne recherche franchement sa compagnie. Ici, c'est surtout le Père Blaise qui profite de ses piques insidieuses. Sacré Merlin : Bon à rien, mauvais à tout !

- Perceval et Karadoc : Les deux inséparables, la main gauche et la main droite d'un même esprit (si seulement ils pigeaient le concept de droite et gauche), les Laurel et Hardi de la chevalerie bretonne, les heckel et jeckel de la bouffonnerie médiévale, les Placide et Muzo du Graal, la Team Rocket avec les catastrophes mais sans les Pokemon. Avec eux, rien ne va plus normalement (déjà que sans eux...). Les règles de la guerre et du combat à l'épée : enfoncées ! Une malheureuse chausse peut ainsi devenir une terrible arme en pratiquant le «lancer omniscient» (ne cherchez pas, il n'y a qu'eux qui se comprennent véritablement). La logique n'a plus d'endroit où se réfugier, ce qui leur fait peur vous ferait sourire et inversement. Si, en plus, il n'y a plus de jambon sec à se mettre sous la dent, alors là, garez-vous, les gueux sont fait, vous allez voir ce que vous allez voir !
Bien que d'autres couples drôles et improbables émaillent l'ensemble de cette série (on pense évidemment aux "petits pédestres" Yvain et Gauvain, qui ne sont pas mal dans le genre débilos, mais absent ici), il semble évident que les têtes de gondole - ou, plus exactement, celles qui font le plus se gondoler le lecteur -, ce sont ces deux triples buses-là ! le pire (le mieux) c'est qu'ils ne se rendent pas compte, la plupart du temps, de leur stupidité ni de cette chance inouïe qui leur permet de survivre à tout, qu'ainsi ils accomplissent ce que le plus brave, intelligent, vaillant (et compréhensif...) des Rois ne parvient que difficilement à achever. Ils ne pigent jamais rien à rien, pourtant rien ne peut se faire sans ces deux zigotos-là. Décidément, bienheureux les simples d'esprit : la quête du Graal est à eux !

- Arthur : Roi. D'une certaine manière, il n'y a pas grand chose à ajouter. Il est intelligent mais on ne l'écoute jamais, il est courageux mais il s'en trouve toujours un (ou deux, voir supra) pour faire le héros bien malgré lui, il essaie de donner le change un peu à tous, ce dont personne, jamais, ne le remercie, il a de l'idée, mais comme tout les autres n'en font qu'à leur tête... Et même lorsqu'il pressent un danger (ici, quelque chose me dit que la jeune femme bizarrement apparue dans le dernier tiers de l'album est aussi louche qu'Arthur le suppose. Mais c'est peu d'affirmer que tout le monde s'en tape, ne retenant que l'absence inaccoutumée de courtoisie de leur chef ! Réponse dans la suite de ce dyptique).

- La Quête : Et bien... Une quête, quoi ! Avec des bestioles affreuses - ici, ces fameux basilics dont il est expressément conseillé de ne jamais croiser le regard, à moins de vouloir jouer les statues pétrifiées ce qui n'est guère pratique pour la suite -, des petits lutins verts très désagréables et affamés (Karadoc et son jambon sec s'en souviennent encore), des chausse-trapes, des couloirs sans fin, des trous, encore des couloirs, des pièces cachées, des jardins secrets, des couloirs, un chemin très labyrinthique pour trouver quoi... Heu... Ah oui, au fait, qu'est-ce qu'on vient y chercher, dans cette quête...? Mince, parce qu'il y avait un but...?

Oui ! Celui de passer un excellent moment de rire par le biais d'une histoire hautement rocambolesque, avec des réparties qui ne décevront pas les amateurs de la série crée par Alexandre Astier, et d'ailleurs, ça tombe bien puisque le scénariste de cet album, comme des précédents, n'est nul autre qu'Astier en personne.

Quant au dessin... Admettons que c'est loin d'être le meilleur qu'on a jamais vu dans le domaine de la BD, que Steven Dupré est surtout contraint de reprendre, tout en les réinterprétant pour la cause, les traits des principaux acteurs de la série (et, espérons-le, du film, si celui voit enfin le jour) mais leur stylisation progressive, au fur et à mesure de cette suite qui compte désormais huit titres au compteur, a peu à peu permis au dessin semi-réaliste de l'artiste de lui concéder quelques marges de manoeuvres. Pour le reste, l'univers graphique est celui du médiéval-fantastique dans lequel bien des libertés sont permises, et c'est une très bonne chose pour la créativité !

Ne boudons donc pas notre plaisir, surtout que la fin de ce huitième volume en promet un neuvième, puisque rien de cette quête n'est résolu à la fin de l'ouvrage. Il est seulement à espérer qu'il ne faudra pas attendre cinq années de plus pour le trouver dans les bacs... Sinon, comme le hurle Bohort, à force «nous allons tous finir pétrifiés ! C'est une hérésie ! Sire !»
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