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Critique de Apoapo


Ce roman, par l'interposition de deux personnages-narrateurs, contient la biographie romanesque et fantasque des quelques hommes du XIX siècle qui se passionnèrent de nuages en fondant les prémisses de la météorologie moderne. Ces biographies, de savants - Luke Howard, Richard Abercrombie, William Williamsson - et du peintre Carmichael, constituent la partie la plus détaillée et instructive du récit, mais s'y greffent aussi des éléments narratifs fort intéressants sur la vie du principal personnage-narrateur, le vieux styliste japonais Akira Kumo. Son récit adressé à sa bibliothécaire Virginie Latour, dans le cadre d'une relation amicale et sentimentale que la parole développe, lui permet à la fois de (se) préciser les raisons de sa nouvelle lubie de collectionneur d'ouvrages consacrés aux nuages, ainsi que, par là-même, de se remémorer son enfance et d'autres parties refoulées et obscures de sa propre biographie, à l'ombre du Nuage par antonomase, le nuage atomique d'Hiroshima.
Le lecteur avisé devine vite cette association historique, même s'il se laisse aller à la séduction du jeu de reconstitution progressive de mémoire, si bien mené. Il lui faut plus de temps pour déceler d'autres analogies plus subtiles, comme celle entre la sexualité (frôlant la perversion) de Richard Abercrombie et celle de Kumo lui-même. L'auteur suggère : "Ce que Virginie Latour avait d'abord perçu comme le long et doux cortège des amoureux de nuages comporte, elle s'en aperçoit maintenant, un peu trop de suicidés, de désespérés, d'amoureux éconduits et de solitaires tristes." (p. 280) : et c'est presque un "understatement"... Par contre serait-ce surinterpréter que de faire l'hypothèse d'une analogie entre tous ces amoureux de nuages et différentes formes de perversion sexuelle ?
Et sur cette question, le grand manque de ce roman, me semble-t-il dès le début, c'est l'impressionnant silence, l'énorme anémie narrative concernant le personnage féminin, cette Virginie Latour, qui ne sert presque que de catalyseur de récits, et qui ne possède de caractère qu'une caractéristique dysfonctionnelle relative, encore, justement à sa jouissance sexuelle...
Nuages-mort, nuages-perversions... ç'eût été véritablement passionnant. Et le seul personnage féminin était justement là, à portée de la plume !
Matière pour un autre roman, peut-être ? Voici en effet l'excipit:
"Virginie Latour pense aussi, sur sa petite île blanche au milieu des tempêtes, qu'elle va vivre sa vie. Mais ceci est une autre histoire."
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