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Critique de oblo


Dix-neufs récits racontent l'histoire de l'année dix-huit du siècle vingt dans la ville de Petrograd. Récits courts, quelques pages à peine, qui sont comme des clichés photographiques d'une ville prise dans les tourments de son époque. Après les deux révolutions de 1917, le pouvoir bolchevique se met en place. La famille impériale est massacrée en juillet 1918, bien loin de la capitale. Mais au-delà des luttes politiques qui agitent le pays, ce sont bien les conséquences économiques dramatiques de la guerre qui semblent constituer la toile de fond des récits d'Isaac Babel.

Isaac Babel narre ses visites dans la ville ; dans la rue, au marché, auprès d'une association pour aveugles, à l'église ou au palais d'Hiver, Babel est le témoin de ces vies de misères, vies exemplaires d'un monde nouveau où la nourriture manque tellement qu'on abat les chevaux pour ne pas les nourrir et pour les manger (Les chevaux), monde nouveau où l'on dénonce avec mesquinerie les paroles entendues pour se sauver soi-même (A propos d'un Géorgien), monde nouveau où l'arbitraire de la violence se veut justice (Un soir).

Peu d'espoirs dans les écrits de Babel. Les aveugles, laissés à leur sort à l'approche des Allemands, retournent finalement à Petrograd ; les nourrices des prématurés ont à peine assez de nourriture pour se sustenter elles-mêmes ; les soldats reviennent d'Allemagne, misérables et estropiés. Il n'y a qu'à la campagne que l'on respire un peu, au contact de la terre que l'on travaille sans se presser, cependant que la guerre, qui n'est pas finie, donne encore lieu à des scènes cocasses où des soldats, finlandais, refusent pour partie d'aller au combat.

De tout cela, Babel est le témoin à la fois privilégié et détaché. Babel ne se lamente guère : il dresse un catalogue, il dessine un portrait, celui d'une Russie exsangue. Les mots sont précis, et ils sont aussi parfois empreints d'une poésie qui est celle de la nature, du jour qui se lève, des sentiers "qu'engloutissent avidement les herbes qui chuchotent". 1918 n'était pas si terrible ; il suffisait simplement d'y survivre.
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