Les Strates

Aussitôt achetée, aussitôt lue ! Cette BD de Pénélope Bagieu a résolument un ton très intimiste puisqu'elle se propose en une vingtaine de courtes histoires de brosser une petite autobiographie de la jeune dessinatrice. Enfin, il s'agît davantage de la relation d'événements marquants de son enfance et de son adolescence – ses fameuses « strates » – sur lesquelles la jeune femme d'aujourd'hui s'est construite. Dès le premier récit, le ton est donné : les larmes se cacheront non loin derrière les sourires. Notre coeur y fera des bonds : du rire au malaise, de la nostalgie à la tristesse, c'est toute une palette d'émotions qui va colorer cet album tout vêtu de noir et blanc. Pour moi et sans détour, c'est une véritable réussite car il donne à ressentir avec pudeur mais sans tabou tous les passages empruntés par la petite fille pour devenir la femme aujourd'hui. Ces passages que toute fille emprunte bien malgré elle et qui vont des gros couacs farfelus aux récits douloureux longtemps inavoués. Il en faut de l'estomac pour se dévoiler sans détour dans la simple intention – à des années-lumière de l'impudeur – de resserrer le lien entre toutes les femmes, celles d'hier, d'aujourd'hui et de demain. Un album qui crée certes ce lien de sororité mais que j'ai sans scrupules laissé lire à mon grand garçon de 12 ans. Car ici c'est un portrait de femme universel et touchant que nous livre cette pétillante et brillante dessinatrice : celle d'une femme portant ses doutes, ses faiblesses et ses douleurs comme un étendard de couleurs. On y parle sexe, tampon, regard de l'autre, construction de la féminité avec toujours un brin d'humour et tellement de finesse et d'intelligence. Que j'ai aimé la dernière histoire ! J'ai refermé ce joli carnet le coeur alourdi, non pas de peine mais consciente de porter en moi les strates d'amour qui m'ont construites. Un gros coup de coeur !