Monsieur de
Balzac,
On voulait que je vous lise. Votre seul nom m'avait mis des frissons dans le dos! J'imaginais déjà les pages tournées, passées l'air de rien; inutiles de toute façon : de la description, toujours de la description ces réalistes!
Et puis j'ai lu...
Terribles et fascinants, ces hommes, ces familles qui croisent la grande Histoire! Ca les lamine, ça leur tire l'âme avant la mort, ça leur prend l'humanité !
Chabert sort in extremis d'un charnier mais son nom y est resté, lui! Comment vit-on quand on a plus de nom ?
Et Juanito, "
el verdugo", où trouve-t-il la force d'éxécuter toute sa famille ?
Où la comtesse Stéphanie a-t-elle laissé son âme, elle ? Sur les bords de la Bérésina?
Et cette mère, la comtesse de Dey, qui attend son fils (qui doit s'évader pour échapper à l'exécution), laisse la porte entrouverte, attend, attend encore...
Vous m'avez bluffé, Monsieur de,
Balzac! Parce que vous avez su croquer l'horreur au fond des hommes, la détresse, la déréliction, par des récits assez courts, vifs, qui saisissent le lecteur et se gravent pour longtemps dans la mémoire...