Le deuxième jour, le soleil fit son apparition pendant une
heure et trente-huit minutes. Ce fut un moment de joie qui
ragaillardit les deux hivernants. Certes, l’astre de jour n’avait
fait qu’effleurer l’horizon, mais cette lueur aussi ténue que
fugace les avait coupés de leur isolement. Le temps de cette
vision rassurante, la vie avait semblé reprendre dans un
environnement où les seules traces d’ADN étaient celles
contenues dans leurs corps épuisés. Sans lumière ni chaleur,
point de vie, avait remarqué Coline. Sans eau, sans nourriture ou
sans oxygène non plus, s’était-elle dit après réflexion. Et seule ?
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Comment survivrait-elle ? Les besoins primaires étaient
essentiels à la survie. Mais les autres étaient nécessaires à la vie.
À l’heure où j’écris ces mots, nous ne sommes plus que
six survivants. Cet endroit empeste la mort. Je ne dors plus. Nous
avons presque épuisé nos réserves. Il fait froid. De plus en plus
froid. Et il fait noir. Je n’en peux plus d’affronter ces conditions
inhumaines. Mais ce que je crains le plus, c’est la solitude. Je ne
veux pas mourir, surtout pas seule. Si nous devions tous périr
ces prochains jours, je voudrais être la prochaine. Je ne
supporterais pas d’être la dernière.