AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Paulette2


Je vois les qualités évidentes de ce roman qui vient d'être couronné par le Grand Prix du roman de l'Académie française 2023 : style précis et reposant, nostalgie élégante, "charme mélancolique" de la vie en province dans les années 50, thème du secret et questionnement correspondant. Que se passe-t-il en effet quand on ne dit pas les choses gênantes, comme les liaisons adultères ? Peuvent-elles s'effacer ? Ces questions permettent au récit de jouer à plein son rôle de révélateur, qui arrache des scènes entières à l'oubli supposé, ce qui donne au geste d'écrire une certaine force.

Pourtant quel ennui ! Ma lecture me rabattait vers une impression molle de déjà vu, je pensais à Camus, à Duras, à Annie Ernaux, à Chantal Thomas. Ils étaient là, en moins bien.
Et puis quel hiératisme ! Il faut attendre la centième page pour qu'apparaisse enfin cette possibilité d'aventure extra-conjugale dans le personnage d'Yves Prigent, qui pourrait bousculer le déroulement très sage et linéaire d'un récit engoncé dans les souvenirs - mais elle restera avortée, rendormons-nous. le style est d'un académisme suranné (peut-être est-ce un atout pour séduire l'Académie française…). le personnage de Madeleine est ennuyeux et inexpressif au possible, et plus généralement, les personnages frôlent le stéréotype (on a donc un bellâtre séducteur, une provinciale belle et timide, un mari bien gentil qui finira par pardonner). Les dialogues sont lourds, la voix des personnages est écrasée par la vision omniprésente de la narratrice. Tout est à sa place, rien ne bouge, sauf les pages qu'on tourne, peut-être.
Chez Duras par exemple, puisque le style blanc et l'atmosphère coloniale nous y ramènent sans cesse, le dépouillement se mêle à une sauvagerie, une violence des personnages qui viennent le ravager. Rien de tout cela dans ce récit au rendu maniéré. Une sorte de Duras sans alcool… Cette rigidité scolaire fait passer la nostalgie, un beau sentiment léger, pour du passéisme, quelque chose de nettement moins sympa…

Lu dans le cadre du Grand Prix des lectrices Elle 2024
Commenter  J’apprécie          90



Ont apprécié cette critique (8)voir plus




{* *}