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Critique de Eve-Yeshe


Tony Webster est un héros sympathique, qui prend conscience au bout d'une longue introspection, qu'il est peut-être passé à côté de sa vie. Il croyait avoir réussi, socialement dans son métier et dans son mariage, menant une vie rangée, à l'aise financièrement, le rêve de sa génération, dans les années soixante.

Il pensait avoir fait table rase du passé, et enfoui tout au fond de sa mémoire ce qui s'était passé avec son amour de jeunesse Véronica, croyant lui avoir réglé son compte après la fameuse lettre. C'était un jeune homme, puis un homme mûr, plutôt pragmatique : en tournant le dos au passé, il pensait le tenir à distance et maîtriser sa vie.

Mais le passé n'est jamais très loin, surtout quand on a éludé le problème au lieu d'y réfléchir. Quand il reçoit la lettre du notaire, lui annonçant que la mère de Véronica lui lègue cinq cents livres et le journal intime d'Adrian des questions vont se poser, l'obligeant à cheminer vers la vérité.

J'ai aimé le voir s'empêtrer dans ses sentiments, ses certitudes puis ses doutes, se attitudes maladroites avec Véronica qui ne va jamais lui donner le moindre élément pour qu'il y voit un peu plus clair. Il détricote le passé, revoit les évènements sous un autre jour, il a mûri depuis, il réfléchit différemment, il sait qu'il n'y a jamais de certitudes. Une phrase illustre très bien les choses : « Mais, je dois souligner de nouveau que c'est mon interprétation actuelle de ce qui s'est passé alors. Ou plutôt, mon souvenir actuel de ma façon d'interpréter ce qui se passait à ce moment-là. » P 61

Même si c'est douloureux, si parfois on a envie de le bousculer un peu pour qu'il aille plus loin, plus vite dans cette introspection, j'ai aimé aussi la manière dont Julian Barnes nous décrit les années soixante, l'éducation de l'époque, et aussi le quatuor de jeunes lycéens ambitieux, imbus d'eux-mêmes, persuadés qu'ils savent tout, une ambiance qui me rappelle « le cercle des poètes disparus ».

Julian Barnes parle de fort belle manière des traumatismes, du suicide, l'hypocrisie de la société : « Mais, aux yeux de la loin si on se tue, on est par définition fou, du moins au moment où on commet l'acte. La loi, et la société, et la religion disent toutes qu'il est impossible d'être sain d'esprit et de corps et de se tuer ». P 70

C'est le premier roman de Julian Barnes que je lis et il m'a plu, malgré quelques longueurs car on sent la fragilité de cet homme et on le voit évoluer, progresser à tâtons, essayer de comprendre sa propre histoire, mais aussi celle de ceux qui l'entourent. L'auteur nous livre, dans ce roman, une réflexion profonde sur les imperfections de la mémoire.

Je ne sais pas si j'ai aimé ce roman ou si j'ai été séduite par certaines phrases, certaines réflexions sur la vie, la mort, le temps qui passe. « On croyait faire preuve de maturité, quand on était seulement en sécurité. On croyait être responsable, mais n'était que lâche. Ce qu'on appelait réalisme s'est révélé être une façon d'éviter les choses plutôt que de les affronter ». P 125 En tout cas, c'est un livre qui fait réfléchir, qui trouble, désarçonne, dérange car un brin moralisateur et que j'ai repris avec plaisir pour trouver des extraits significatifs.

Note : 7,6/10


Lien : http://eveyeshe.canalblog.co..
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