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Critique de ALDAMO21


Tout d'abord je remercie Claire Barré, qui déjà avec un de ses livres ; « Pourquoi je n'ai pas écrit de film sur Sitting Bull », nous révélait l'existence de Ernie LaPointe, l'arrière-petit-fils du grand chef indien.
L'auteure l'avait rencontré à maintes reprises et s'était liée d'une grande amitié avec cet homme.
Cette fois-ci, Claire Barré a collecté sous forme d'un livre, le récit de vie d'Ernie LaPointe.
Elle permet à ses fidèles lecteurs et ainsi qu'à des personnes curieuses, de donner plus de visibilité à cet arrière-petit-fils du chef Lakota.
Surtout à notre époque, où une tendance à faire table rase du passé, se fait sentir.

Par ce livre, la lumineuse Claire Barré rend honneurs « aux natifs » et leur permet d'entretenir le devoir de mémoire.
Et qu'aussi l'histoire des Lakotas ne se trouve dans aucun livre, puisqu'elle fût toujours transmise en récits oraux.

Ernie LaPointe, insiste bien sur le terme « natifs », pour désigner son peuple et tous les autres tribus autochtones vivant en Amérique du nord.
Le mot « Indien », qui l'agace, venant d'une erreur de Christophe Colomb qui croyait avoir accosté dans les Indes orientales.
*

Le livre qui referme le témoignage bouleversant d'Ernie, se présente en deux parties ;

La première parle du destin tragique que tous les « natifs ». Une histoire qui n'est pas celle que l'on trouve dans les manuels d'Histoire des Etasuniens. Cette version écrite par les vainqueurs et en conséquence qui fut manipulée, tronquée, modifiée, par les livres de littérature et en autre exemple, par les films du Far West Hollywoodien et du gentil cowboy.

Ce fût véritable « un ethnocide » de plusieurs millions de morts, parmi les Sioux, les Apaches, les Cheyennes entre autres, qui fut perpétuer au cours des siècles. Où une foule d'envahisseurs acharnés, de conquistadors, de prospecteurs d'or, de négociants, de spéculateurs, de colons et d'indépendantistes, assassinèrent sans état d'âme, des hommes, des femmes, des enfants et des vieillards.
Ces assassins pratiquèrent plusieurs méthodes pour mener à bien leur génocide, par d'ignobles massacres bien sûr, mais aussi en leur apportant des épidémies nouvelles et en chassant le bison, leur première nourriture.

Mais que pouvaient donc faire tous ces peuples des grandes plaines, vaillants et fiers, armés seulement d'arcs et de flèches contre une armée de fusils et de leurs balles meurtrières ?
*

« Un bon Indien est un Indien mort » disait la formule apocryphe en cette fin du 19e siècle. Elle reflète à elle-seule le racisme, le mépris et l'état d'esprit dominant chez les Étasuniens.
*

Les « natifs » qui échappèrent à cette terrible extermination, furent parqués, enfermés comme des bêtes ou des monstres dans des camps appelés ; « Réserves ». Des lieux implantés, ô suprême supplice, sur leurs terres-mêmes, celles qui leur furent confisquées, volées, spoliées.
Renonçant à assimiler ces peuples désormais leurs « captifs », les nouveaux Etats-Unis commencèrent à appliquer une rigoureuse « déculturation. »

Les aïeux d'Ernie LaPointe n'échappèrent pas à ce cruel destin tracé par les Wasichus (hommes blancs). Ils furent les témoins de leur propre chute et les spectateurs de leur décadence.
Ernie raconte ce que fut son enfance faite souvent de moqueries, de brimades, d'interdits.
Il raconte que tout jeune, le gouvernement les forçait à aller à l'église, les obligeant à faire parfois plusieurs kilomètres pour se rendre à la messe.
Le but étant de les convertir.

A l'école, il était interdit de parler le « Lakota » sous peine d'une punition. Et ce n'est que deux exemples parmi tant d'autres.
Cela se passait dans les années cinquante, ce n'est pas si vieux que cela, lorsqu'on y pense. Et ce sera une véritable tragédie qui frappera tout un peuple.
Beaucoup de « natifs » se retrouvèrent sans travail, d'autres se réfugièrent dans la drogue dure et l'alcool.

Tout ceci fit des ravages de plus ! Et ce sera des générations d'hommes et de femmes qui perdront leur culture lakota et ses quatre piliers fondamentaux, qui perdront leurs traditions, leur langage et pour beaucoup leur identité.
*

La deuxième partie, concerne la vie de Ernie LaPointe, dont le Wasichu a coupé insidieusement et soigneusement toutes les racines. L'homme déjà bien perturbé va alors s'engager dans l'armée et partira faire la guerre au Vietnam. Il en reviendra avec un sérieux choc post-traumatique qui le rendra instable une partie de sa vie.
Suivra pour lui alors de longues années d'errance où ce « Natif » changera souvent de travail, de région et se mettra à boire, comme beaucoup des siens.

Mais au-delà de tous ses malheurs, ses déceptions et de sa souffrance, Ernie fera de très belles rencontres qui changeront petit à petit sa vie. Il y rencontrera Sonja sa femme actuelle, qui fut déterminante pour la reconstruction de son mari.

La rencontre la plus magique d'Ernie LaPointe sera avec les « hommes de lumière », des grands, des vrais. Pas comme tous ces faux messagers qui prétendent communiquer avec les esprits ou tous ces richissimes prédicateurs évangélistes qui se gaussent devant un micro, d'être en relation avec Dieu.

De merveilleuses rencontres avec des hommes qui avaient gardé précieusement et secrètement leur foi, leur croyances ancestrales et qui inviteront Ernie à faire des voyages intérieurs. Des voyages qui le ramèneront doucement à ses racines, qui le reconnecteront à son passé, au passé de son peuple, pour retrouver l'essence, l'âme et le souffle de ses ancêtres disparus.

Ernie LaPointe sera un homme nouveau, un homme regénéré, l'homme qu'il est aujourd'hui, qui philosophe sur la nature et qui se questionne sur le devenir de l'humanité.
Un homme qui parle des grandes Prairies malheureusement parfois trop polluées, qui parle des étoiles trop effacées, que les nuages toxiques des usines.
Un homme qui regarde passer d'autres hommes, ceux qui courent hagards et égarés, ceux qui se débattent emportés par la haute lame du consumérisme, de l'individualisme et du mondialisme.
Des hommes, ceux qui ne prennent plus le temps de s'arrêter, de regarder. Des hommes qui simplement ne prennent plus le temps de vivre.
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