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Critique de jovidalens


Comment parler de cette lecture ? Lecture "schizophrénique" parce qu'accompagnée de ce vertige entre deux mondes, entre l'espace temporel où se situe le roman et ce que nous savons de l'histoire des années suivantes, cette sensation d'évoluer sur le bord d'un volcan dont on voit avec effroi la lave en fusion se rapprocher dangereusement du bord du cratère ; mais aussi d'imaginer que Vicki Baum, quand elle l'a écrit, "balançait" entre rester ou partir d'Allemagne...La sensation d'être sur le fil du razoir quand il faut prendre une décision vitale.

Très riche et beau symbole cette porte pivotante par laquelle on entre ou sort de ce Grand Hôtel, comme on entre ou sort de la vie, par hazard, avec des espoirs et des envies, sans savoir, sans connaître les êtres qu'on y croise. Et ce passage dans lequel l'espace d'un instant on est isolé entre deux parois de verre, qui tourne plus ou moins vite.
Et puis, comme le chantait Jacques Brel "au suivant" : ces chambres de vie aussitôt libérées sont aussitôt prêtes à accueillir...un autre, sans garder de mémoire du précédent. Ronde, succession un peu folles, d'agitations vaines.
Dans cet espace, à peine l'opportunité, le temps nécessaire pour lier des amours et amitiés dont la pérenité est aléatoire. Monde d'illusions, de dorures de théâtre et de musiques entrainantes mais si lointaines, assourdies...par le bruit du trafic, des nuisances extérieures.

Il y a une urgence et une folie dans ce roman. Pas de gaieté, juste une soif de vivre que rien n'assouvit. Tout est...ébauché, râté parce que précipité.

Même si chaque personnage est solidement campé, depuis le plus petit portier jusqu'aux principaux héros, on a tout de même la sensation d'en savoir bien peu, juste ce qu'ils voudront bien laisser transparaître de leurs vies, comme les petites révélations d'une rencontre éphémère.

Quand Vicki Baum a écrit ce roman elle avait quarante et un ans, le mi-temps de sa vie, ce temps où chacun fait le point sur le chemin parcouru et se pose la question de son devenir. Question d'autant plus urgente que l'environnement politique et sociètal de ce Berlin des années folles étaient porteur de menaces.
J'ai eu l'impression qu'elle hésitait entre deux représentations d'un choix de vie : celui du médecin blessé, solitaire et désabusé qui s'assoit et regarde l'agitation des autres ou celui de la toute jeune femme lucide, qui a des projets et dont toute l'énergie est focalisée pour atteindre, avec enthousiasme, son rêve d'une vie meilleure.

Très beau , très fort roman, superbement écrit qui parle d'impermanence et de fragilité.

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