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Critique de florigny


Gelsey est une artiste-peintre mais pas seulement. Elle est également une dragueuse-drogueuse, narco-voleuse qui appâte des pigeons dans des bars new-yorkais, monte chez eux, leur refile un petit coup d'assommoir sous la forme d'un cocktail amélioré avec des somnifères, et pendant qu'ils ronflent, ramasse les voyantes Rolex, les bijoux chers et vulgaires, l'argent liquide gonflant les portefeuilles de ces vaniteux lubriques, puants d'arrogance et au charme agressif. Avant de quitter les lieux, elle dénude ses proies et grâce à une encre indélébile et en écriture inversée lisible à l'endroit face à un miroir, laisse sur leur peau un message infamant qu'ils devront expliquer à leur femme. le devoir accompli, Gelsey n'a plus qu'à regagner son logis, un appartement situé au-dessus d'un labyrinthe de miroirs, construit par son père. Ce petit jeu aurait pu se poursuivre longtemps, si un pigeon ne s'était pris du plomb dans l'aile sous la forme d'une balle dans la tête. Et voilà le Lieutenant Frank Janek sur les dents, alors qu'il s'acharne dans le même temps à régler une vieille affaire non-élucidée, dans laquelle un élément nouveau vient d'apparaître. Son voyage à La Havane pour rencontrer un témoin tardif est le seul point noir du roman. Il est selon moi, totalement inutile, hors sujet, et les observations politiques faites par Frank Janek sont quelque peu caricaturales et délicatement teintées d'un anti-communisme typiquement américain.


Labyrinthe de miroirs n'est pas un roman d'un abord facile. On y retrouve toutes les obsessions de William Bayer, l'art, la psychanalyse, l'inceste. Une fois encore, il explore les zones grises entre le bien et le mal ou le vice et la vertu. Il s'interroge sur la loyauté ou la tentation de la corruption, dilemme constant tout au long de la vie d'un policier. En outre, il se livre à une étude approfondie des labyrinthes de miroirs dont j'ignorais qu'il n'en existe qu'une demie-douzaine d'exemplaires au monde, abstraction faite des palais des glaces des fêtes foraines ; dont j'ignorais également qu'ils ont donné lieu à des études universitaires dans les domaines de l'architecture, de la psychologie ou de la mythologie.


L'histoire de Gelsey est révélée à mesure que l'intrigue progresse, et l'on comprend bientôt pourquoi elle éprouve une sorte d'extase à se perdre dans le labyrinthe, à se plonger dans l'incertitude et l'égarement, à être environnée d'images fragmentaires de son corps, de reflets qui vacillent au gré de ses mouvements, ou de milliers de sosies si elle tourbillonne. Gelsey n'est plus seule lorsqu'elle est cernée par une myriade de clones. Qui voit-elle ? Sa jumelle ? Son contraire ? Son double ou son reflet, tels que décrits dans la Théorie du Miroir ? Après avoir convoqué Dorian Gray, le Minotaure, c'est à La Dame de Shanghaï et à sa dernière scène mythique que William Bayer rend hommage dans son épilogue.


Dans sa postface, l'auteur dit son admiration pour Michael Ayrton, sculpteur et écrivain, obsédé par les mythes de Minos, Pasiphaé, Dédale et Icare, et dont la vie fut transformée par le concept du labyrinthe. Dans The Maze Maker, il écrit : « La vie de chaque homme est un labyrinthe au centre duquel gît sa propre mort. »
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