Citations sur Au-delà de la crise des migrants : décentrer le regard (6)
Appeler "réfugiés" les personnes qui se pressent aux portes de l'Europe en arrivant dans des conditions tragiques, c'est invoquer le droit humanitaire et d'emblée reconnaître la légitimité de leur présence et la nécessité de les accueillir. A contrario, les nommer "clandestins", c'est à la fois insister sur leur illégalité (supposée) et sur leur caractère indésirable. Cette opposition sémantique irrigue les discours publics et signale les positionnements politiques.
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Ce chapitre propose d'interroger cette vision unilatérale de l'immigration qui ne pense les flux que de l'étranger vers la France. L'émigration, c'est à dire les sorties du territoire français pour l'ensemble des individus y résidant à un moment donné, qu'ils soient français de naissance, immigrés ou étrangers, est en effet mal connue en France.
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Si les migrations et les migrants n'étaient plus systématiquement synonymes de "misère du monde" mais reconnus comme une richesse, les positions dans le débat sur le degré d'ouverture des frontières s'en trouveraient sans doute profondément modifiées.
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Alors que les personnes nées à l'étranger représentent environ 10% de la population, l'enquête sociale européenne montre que les habitants de la métropole imaginent qu'ils sont près de 30%. Cet écart témoigne d'une formidable distorsion entre les phénomènes migratoires et leur perception. Il ne fait pas de doute que les images diffusées par les médias télévisés impriment dans les esprits un sentiment d'invasion.
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On suppose implicitement que les immigrés viennent s'installer de façon définitive, comme si l'arrivée en France marquait l'achèvement de leur parcours migratoire. Pourtant, beaucoup d'entre eux repartent. De récentes estimations suggèrent que 20 à 50 % des immigrés présents dans les pays de l'OCDE repartiraient dans les cinq années suivant leur arrivée.
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Ainsi les résultats de ce chapitre sont cohérents avec l'idée, depuis longtemps admise par les spécialistes des migrations internationales, selon laquelle les migrants constituent un groupe "sélectionné" qui n'est pas représentatif de la population de leur pays d'origine.
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