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Critique de 4bis


Il y avait eu le billet de Michel qui avait laissé son empreinte et, quelques semaines après, l'opportunité d'écouter Jeanne Benameur échanger avec Francis Eustache pendant le festival Epoque à Caen. J'ai beaucoup aimé cette conversation qui, au sein d'un cadre assez académique, a laissé à chacun la place pour délivrer son chant et a permis tout de même, plus qu'on aurait pu l'espérer, que se tisse entre les deux une forme de dialogue résonnant. Même s'ils étaient face à face, Jeanne Benameur parlait depuis son île, depuis le lieu de l'écriture et du faire avec les mots. Francis Eustache avait la posture de l'écoutant, de celui qui vient témoigner de ce qu'il a entendu et compris sans être professoral pour autant, sans délivrer aucune certitude néanmoins. J'ai beaucoup apprécié la place qu'il faisait dans ses réflexions de cogniticien à la poésie, à la psychanalyse et à l'écriture.
Tout ça pour dire que ma lecture de la Patience des traces avait été surinvestie en amont d'une bonne couche d'attendus. Je me suis un peu agacé au début du dispositif romanesque, peinant à trouver une incarnation à ce psychanalyste face à l'océan, rencontrant providentiellement une jeune consoeur à un moment charnière de son existence, bénéficiant d'un ami idéalement conçu pour lui organiser le voyage de ses rêves sans qu'il ait même à expliciter quoi que ce soit. Mais, comme au théâtre ou dans les livres d'enfants, acceptant cet artifice conventionnel pour ce qu'il met en place, je suis rentrée dans cette histoire faite de réminiscences et d'éclairages nouveaux.
C'est une très jolie histoire, pleine de douceur et d'acceptation. D'une connaissance désabusée de l'humain aussi, des vaines petites raisons qui sont capables de l'enfermer une vie durant, cultivant le plaisir morbide d'une souffrance assignatrice. le périple au Japon, les sources chaudes, la texture des tissus anciens et ceux que l'on teinte encore aujourd'hui, le retour à l'eau, au sommeil, tout cela m'a agréablement bercé. Toujours de façon un peu précaire toutefois, sans qu'il faille grand-chose pour que je trouve les phrases brutalement simplistes, l'évocation cliché.
Je me suis dit aussi, le livre refermé, que je ne lirai qu'un de ce genre de livres. Qu'il doit être difficile, quel que soit le parcours et l'alibi romanesque dont on le pare, de raconter autre chose de ce point de vue. Les récits de psychanalyse font-ils remonter autre chose qu'une scène dont le témoin acteur s'est arrangé d'y lire une fracture ? Et toute l'accumulation des strates, répétitions, édifications de paravents, boulettes de fils et de poils, miroirs et pelotes comme autant de nouvelles digestions, régurgitations de cette scène qui aura fait le coeur de la vie psychique. Sans doute que c'est fascinant à vivre quand c'est de votre existence qu'il s'agit, que vous avez fait vôtre cette manière de concevoir votre rapport à vous-même, au monde et que vous y avez consacré toute votre énergie. A lire, c'est intéressant, une fois.
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