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Critique de colka


Les mains libres , roman de Jeanne Benameur est une invitation au voyage dans un autre monde...
Celui de l'errance d'abord. Celle que partage Mme Lure, une vieille femme aux cheveux gris et Vargas, un jeune nomade qui vit dans une roulotte non loin de chez elle. Sans ancrage, ils cherchent à se faire oublier et à oublier des traumatismes d'enfance tapis là, au fond d'eux-mêmes. le prix à payer ? Une solitude qui ne les quitte pas, qui les suit, fidèle compagne...
Mais dans l'univers de Jeanne Benameur, la lumière côtoie toujours l'ombre, heureusement. Et tous les deux font preuve d'un merveilleux pouvoir d'évasion, celui des rêves éveillés qui consolent ou aident supporter une réalité sans doute trop douloureuse si elle devait être affrontée "les yeux dans les yeux". Mme Lure s'évade dans les brochures de voyages qu'elle collectionne au gré du hasard et de sa fantaisie. Pour Vargas, c'est le dessin. Sa main court sur une feuille papier et s'empare du monde, depuis le jour où il a choisi de ne plus parler et de laisser la parole à une marionnette Oro, son double en quelque sorte.
Ce thème de la main qui renvoie directement au titre est très présent dans le roman. Main qui vole une tablette de chocolat comme celle de Vargas, main qui caresse comme le découvre avec étonnement Mme Lure , mais aussi main qu'on embrasse comme va le faire le jeune homme par le truchement de sa marionnette. Présence donc très forte d'une symbolique de la main tendue, qui s'ouvre et s'offre aux autres...
A ce ballet des mains s'associe celui du livre qui lui fait écho et le renforce. le pouvoir et la magie des mots, Mme Lure va le découvrir dans le dernier livre que lisait son époux avant de mourir et ce sera pour elle une sorte de "Sésame, ouvre-toi" à la fois sur le monde et sur l'autre car c'est grâce à un livre laissé près de la roulette du jeune homme qu'elle va entrer en communication avec lui.
Ouverture à soi-même, ouverture sur le monde, Mme Lure et Vargas vont tout doucement en faire la belle découverte. Et la perspective d'un nouveau départ possible pour chacun va se profiler à l'horizon. Pour Vargas ce sera un voyage vers d'autres cieux et pour Mme Lure ce sera un voyage par procuration, en confiant à Vargas une valise dans laquelle se trouvent tous les vêtements de son défunt mari.
J'ai aimé la construction symphonique où les thématiques s'entrelacent et se font écho. Même plaisir pour l'écriture. Comme toujours, Jeanne Benameur cultive avec fluidité l'art de passer de la poésie à une prose plus narrative.
Quelques bémols cependant. Même si je me suis laissé entraîner dans la rencontre fort improbable de ces deux personnages, j'aurais aimé que le personnage de Vargas soit plus fouillé et que son univers, celui des gens du voyage, soit évoqué de façon moins conventionnelle, voire stéréotypée. Plus globalement, j'ai eu le sentiment que ce roman était un peu hybride, un compromis entre une forme poétique qui admet une grande liberté à tous les niveaux et une forme romanesque plus exigeante sur le plan de la structure et du travail sur les personnages.
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