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Critique de Litteraflure


Le printemps arabe a fait tomber les tyrans mais un hiver de répression et de régression lui a succédé. La révolution populaire a été confisquée par l'armée et les islamistes : « en pleine révolution, cette société fait un tour complet sur elle-même et plonge dans son passé. Loin de vouloir s'émanciper, elle veut restaurer les tabous archaïques : l'illusion d'une société musulmane idéale est plus forte que les lumières de la modernité » (p97).
Rachid Benzine fait de cet effondrement un roman puissant dans lequel les deux personnages principaux, Nour (Malika) et Slimane, sont éclatants d'humanité. Nour est magnifique : « un corps de femme, même le plus beau du monde, c'est toujours une forteresse assiégée ». Nour est une pute. Dans son studio viennent s'échouer les âmes damnées d'une société pétrie d'hypocrisie, toute la misère sexuelle de ces hommes que la soumission et la frustration ont rendu violents. Nour fait de son mieux : « Rares sont ceux qui m'ont donné le sentiment qu'ils me quittaient vraiment ressourcés. C'est pourtant la fonction première de mon cul ». Slimane, lui, est un poète homosexuel qui n'a d'autre choix que de se prostituer pour survivre – sa verve et sa verge. Sa liberté de ton fera le bonheur de la révolte.
Il faut avoir vécu (pas seulement voyagé) dans un pays arabe pour comprendre à quelle point la société peut imploser à tout moment. le patriarcat, l'injustice et le retour d'idées rétrogrades minent des citoyens avides d'émancipation. La souffrance et l'inquiétude sont palpables. Rachid Benzine en montre parfaitement les symptômes.
Ce roman est aussi une déclaration d'amour à celles qui contiennent le désir des hommes. Ils leur confient leur honte et leur désespoir. Ils les humilient et trouvent dans leur avilissement la source de leur rédemption. Que serions-nous sans les putes et les poètes ? Cela me rappelle la réponse d'un ami psychanalyste à qui j'avais demandé quels étaient ses plus grands concurrents. « Les prostituées » m'avait-il répondu.
Bilan : 🌹🌹
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