...si nous sondons nos propres conceptions, nous reconnaîtrons, je crois, que tout mouvement absolu dont nous pouvons nous former une idée n'est autre au fond que le mouvement relatif ainsi défini. Car, ainsi qu'on l'a déjà observé, le mouvement absolu, à l'exclusion do toute relation externe, est incompréhensible ; et, à cette espèce de mouvement relatif, toutes les propriétés, causes et effets, mentionnées ci-dessus et assignées au mouvement absolu, se trouveront, si je ne me trompe, applicables. (III, 114)
(...) En un mot tous les corps qui composent l'ordre puissant du monde, ne subsistent pas hors d'un esprit, que leur être est d'être perçut ou connu; que, par conséquent, aussi longtemps qu'ils ne sont pas effectivement perçus par moi, ou qu'ils n'existent pas dans mon esprit, ou dans celui de quelque autre intelligence, ils faut qu'ils n'aient aucune existence. [ §6 ]
Ce serait une erreur de penser que ce qui est dit ici déroge le moins du monde à la réalité des choses. Il est admis, selon les principes reçus, que l'étendue, le mouvement et, en un mot, toutes les qualités sensibles ont besoin d'un support et ne sont pas aptes à subsister par elles-mêmes.
Or les objets perçus par les sens ne sont, on en convient, que des combinaisons de ces qualités, et par conséquent ne peuvent subsister par eux-mêmes. Sur tout ceci on est d'accord. Ainsi, quand nous refusons aux choses perçues par les sens une existence indépendante d'un support ou substance en laquelle elles puissent exister, nous no nous écartons en rien de l'opinion reçue de leur réalité : on ne peut nous reprocher aucune innovation sous ce rapport.
Toute la différence consiste en ce que, selon nous, les choses non pensantes perçues par les sens n'ont point d'existence qui soit distincte de l'être-perçu, et ne peuvent donc exister en aucune substance autre que ces substances inétendues, indivisibles, ou esprits (spirits), qui agissent, pensent et les perçoivent.
Au lieu de cela, les philosophes tiennent communément quo les qualités sensibles existent dans une substance inerte, étendue, non percevante, qu'ils appellent Matière. Et ils attribuent à cette matière de subsister naturellement, extérieurement à tous les êtres pensants, distincte de l'être-perçu par un esprit quelconque, même par l'esprit éternel du Créateur, en qui ils ne supposent que de simples idées des substances corporelles qu'il a créées, si tant est qu'ils veuillent bien accorder qu'elles sont créées. (III, #91)
Il est évident à qui prend une vue d'ensemble des objets de la connaissance humaine, que ce sont ou des idées effectivement imprimées sur les sens, ou bien telles qu'on les perçoit quand on prête attention aux passions et aux opérations de l'esprit, ou enfin des idées formées à l'aide de la mémoire et de l'imagination en composant, divisant ou simplement en représentant celles qui ont été originairement perçues suivant les manières qu'on vient de dire.
Ainsi, quand je ferme les yeux, les choses que je voyais, peuvent encore exister, mais il faut que ce soit dans un autre esprit.
Une intelligence humaine, une personne, n'est pas perçu par les sens, puisqu'elle n'est pas une idée.
En somme, je suis enclin à penser que la majeure partie des difficultés, sinon toutes, qui ont jusqu'ici amusé les philosophes et ont fermé le chemin de la connaissance, nous sont entièrement imputables. Nous avons d'abord soulevé un nuage de poussière et nous nous plaignons ensuite de ne pas y voir.
Le feu que je vois n'est pas la cause de la douleur dont je souffre quand je m'en approche mais le signe qui me prévient de cette douleur. De même, le bruit que j'entends n'est pas l'effet de te o te pouvement ou choc des corps environnants, il en est le signe.
Les diverses questions difficiles et obscures qui ont donné lieu à un abondant gaspillage de spéculation sont entièrement bannies de la philosophie.
Sur les idées : « Car puisque toutes, et toutes leurs parties existent seulement dans l’esprit, il s’ensuit qu’il n’y a rien en elles que ce qui est perçu »
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