La thèse de l'auteur est, bien évidemment, plus subtile que ce que l'on en a fait : il ne nie pas l'existence du "monde réel", mais plutôt, que si la matière est la substance - le support d'accidents, de qualités ou d'attributs -, la matière (en tant que materia secunda des scolastiques, donc) "n'existe" pas, car nous ne connaissons jamais sa "réalité" onto
logique, mais, plutôt, nos perceptions sensorielles, "filtrées" par notre mental et donc, "le réel n'existe pas", non dans le sens où sa réalité objective est niée, mais plutôt que, puisque ne nous ne pouvons jamais connaître les propriétés et qualités des objets, qui différent selon l'observation subjective (étendue, couleurs, ...), nous ne connaissons jamais leur réalité - donc "elle n'existe pas" dans le sens du sujet pensant (subjectif).
Il "radicalise" le point de vue de
John Locke (en niant même la légitimité onto
logique de ses "qualités premières"), sera lui-même radicalisé par
David Hume (qui amène sa vulgate à son terme
logique, niant le rapport de causalité et l'induction, et donc la consistance du "moi" percevant et de toute théologie ou métaphysique... plus de Dieu ou de miracles pour l'évêque !) et, plus tard, aura ses théories tempérées par
Emmanuel Kant (son "esthétique transcendantale" donnera, par exemple, une importance séminale - littéralement - au monde externe, celui ciselé par l'espace et le temps, comme source de notre propre "self-cognition").
Il serait bien sûr aussi intéressant de faire des rapprochements entre notre auteur et les théories du bouddhisme mahayana cittamatra ("esprit-seulement"), un "idéalisme subjectif" fomenté dans l'Inde du Gandhara (actuel Pakistan) du quatre et cinquième siècles de notre ère - soit un peu plus d'un millénaire avant notre évêque -, par les demi-frères Asanga et Vasubandhu (entre autres), mais cela est une autre histoire.
Un autre point primordial qu'on pourrait rapporter est sa critique du temps et espace absolus de la mécanique newtonienne, prédominante à son époque, et ce jusqu'à assez récemment : c'est que, dans le paradigme berkleyien, "l'absolu" perçu est "relatif" au sujet pensant (ou "observateur") - et, bien sûr, cela annonce les résultats de la physique moderne (théorie de
la relativité générale d'
Albert Einstein, ...)