Sociologie des pigeons
(...) Quand ils ont chaud, ils vont à l'ombre, quand ils ont froid, ils vont au soleil. Ils ne marchent pas sur les pieds et ne s'enfuient pas facilement à l'approche d'un humain. Ils sont à l'image du quartier : beaux, riches et en bonne santé. leur vie est douce et sans vague. Ce sont des pigeons bourgeois.
Les choses sont différentes pour les pigeons de Saint-Denis. La vie semble plus dure pour eux. Pour commencer, ils sont vraiment très nombreux. La concurrence est rude. Ils doivent se battre plus bravement pour récolter de la nourriture. (p. 100)
Les immeubles sont vieux et insalubres. Beaucoup d'hommes traînent dehors, en groupe. J'entends depuis toujours que les Noirs et les Arabes ne peuvent s'encadrer, que les Blancs détestent tout le monde et que c'est réciproque, mais ça n'a pas l'air d'être le cas ici, même si c'est vrai qu'on voit plutôt les Noirs avec les Noirs, les Arabes avec les Arabes, les Blancs avec les Blancs. (...) C'était étrange, au début, d'être le seul Blanc. Après quelques semaines, ça ne m'a plus rien fait. (p. 10)
Mais la beauté réside partout. Sa forme peut changer, pas son essence. La beauté de Saint-Denis n'est pas celle du sixième arrondissement de Paris, mais elle existe, c'est évident. (p 44)
Au fond, je peux faire n'importe quoi, aller me balader dans les pires cités de Saint-Denis, avoir un compte en banque en déficit permanent, je reste un riche chez les pauvres, un petit-bourgeois chez les prolos. (p. 65)
Il y a souvent une ligne bien nette entre l’ivresse salutaire et le verre de trop , qui va m’envoyer valdinguer dans les rues à une heure du matin . Mais j’aime ça . J’aime marcher ivre dans les rues le soir .J’aime la lumière jaune - orange des lampadaires , la caresse du froid sur mes joues et les amitiés éphémères que la nuit forme .
Je me débats entre de grandes ambitions, une estime de moi-même déplorable et un ego démesuré.»
La valeur travail était perdue pour moi. Trop gâté, trop paresseux, trop créatif. Le travail est une valeur de nazi de toute façon. (p. 14)
Comment, dans cette vie sans repère, ne pas se retourner l’un contre l’autre ? En un sens, c’était encore s’accrocher à l’amour.
On refoule ça et on vit comme si on n’allait jamais mourir.
Notre couple avait survécu à cette nuit d’hiver noire, notre petite apocalypse