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Critique de Dominique_Lin


J'attends toujours la sortie des romans d'Yves Bichet avec intérêt, car je ne sais jamais où il va m'embarquer, mais je sais que je vais être surpris. Indocile est le 4e roman que je lis de lui, et je peux dire que je ne suis pas déçu.
La similitude entre tous ses personnages, c'est le décalage. Ils n'entrent pas dans le moule social, dans la catégorie des tièdes, des insipides. Chaque fois, par cette forme de marginalité, il révèle les aspérités de notre société.
Après l'homme qui masturbait les dindons (La Part animale), celui qui marchait sur les pointillés rouges de la frontière (L'Homme qui marche) et ces retraités déjantés (L'Été contraire), voici Théo et Mila, deux ados sur le seuil de l'âge adulte qui doivent apprendre à gérer leurs sentiments, leur corps et leur place dans la société d'une façon instinctive, sans mode d'emploi. Ce n'est pas Marianne, qui pourrait être sa mère, qui va l'aider, ni Antoine, le fils de cette dernière et ami de Théo, qui agonit sur son lit d'hôpital suite à un accident en Algérie. Ces deux jeunes sont paumés et s'improvisent amoureux, tout en se cherchant et en se conjuguant au futur, temps qu'ils n'ont pas l'habitude d'employer.
Outre ce thème, c'est aussi un regard sur la guerre d'Algérie avec ses combats, ses morts idiotes, ses attentats en France, la prise de position des journalistes, sur l'objection de conscience des jeunes qui ne veulent pas aller à une guerre qui ne les concerne pas et qui n'en porte pas le nom. D'ailleurs, Théo, qui refuse de partir, ne met pas de mots politiques sur cette décision, ce n'est pas une question d'objection de conscience, mais un choix simple, intuitif.
Et puis, il y a l'écriture d'Yves, étonnante, captivante. Il arrive, par la mise à la marge de ses personnages, à nous recentrer, sans pour autant nous identifier forcément à eux. Par la complexité qu'il donne à leurs tourments, il dénoue certains troubles intérieurs.
Yves Bichet est peut-être lui aussi à la marge des écrivains contemporains. Pas de recherche de notoriété, pas de surmédiatisation, au grand dam de son éditeur certainement, mais une envie d'écrire fougueuse, profonde et légère à la fois. On est dans l'utopie, dans la solidarité. C'est un roman assez sombre malgré ce qu'il disait à propos de L'Été contraire ("La morosité me casse les pieds"), dans une forme de morosité. C'est là l'intérêt de la diversité des sujets et contextes abordés par l'auteur, une remise à plat à chaque titre, une prise de risque, pour construire un ensemble dont nous ne connaîtrons la forme qu'à la fin, a contrario de nombreux auteurs prolifiques…
Lien : http://dominiquelin.overblog..
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