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Critique de si-bemol


“C'est le retour de la loyauté et de l'incandescence, le renfort de la jeunesse, la preuve par le corps. Défier, courir, irradier… (...) Ils manifestent en rigolant, en pleine lumière, insensibles aux soubresauts de ce monde qu'ils abandonnent. Ils sont beaux et sauvages. Ils piaffent, ont envie de tout abolir, de tout embrasser.”

25 mai 1968 à Lyon. Slogans, colère, CRS et lacrymo… Comme partout ailleurs en France, en ce beau mois de mai, la jeunesse lyonnaise s'est enflammée, exubérante, insolente et rieuse, à l'assaut de l'ordre établi, de la République fatiguée et du pouvoir en place. “La révolution est belle, le grand chambardement est en marche”, mais brutalement tout bascule : un commissaire de police écrasé par un camion fou lancé par les manifestants, et voilà le joli mois de mai qui s'endeuille, le drame qui s'invite à la fête et la révolte qui, soudain, a des allures de gueule de bois.

Reprenant les deux personnages de son précédent roman “Indocile” - Mila et Théo - auxquels vient s'adjoindre Delphine pour former le trio de ses “trois enfants du tumulte”, Yves Bichet revient sur les “événements” de mai 68 et mêle la fiction à l'histoire pour revisiter le bouillonnement des derniers jours d'effervescence, les ambiguïtés et les désillusions révolutionnaires, les excès, les saccages, les violences policières, les effrois du pouvoir, la répression et les manipulations politiques, dans un récit qui a les accents d'une épopée moderne.

Roman de la liquidation de mai 68 et surtout roman de l'après, des lendemains désenchantés, des illusions perdues, des émotions qui s'exténuent, de l'amour qui se cherche et qui tangue, et des révolutions manquées qui finiront par se trahir dans l'aveuglement du terrorisme… “Trois enfants du tumulte” est le portrait mélancolique et sombre d'une génération et d'une époque qui croyaient encore aux promesses des idéaux révolutionnaires, aux vertus de la lutte, à la sincérité des engagements. Mais “la révolution part sur la pointe des pieds”. Et c'est la “fin de l'innocence, des heures chaudes et généreuses.” Seules subsisteront la violence et quelques vies manquées, dissoutes dans “la nostalgie du chaos”.

Les personnages sont bien campés, l'écriture est belle, le récit parfaitement documenté et l'analyse sociale et politique intelligente et fine. Je me suis passionnée pour ce roman original et bien construit que j'ai lu d'une traite avec beaucoup d'intérêt et de plaisir. Une réussite.

[Challenge MULTI-DÉFIS 2019]
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