La forêt pourpre

J'ai découvert Algernon Blackwood en recevant ce livre en cadeau d'un ami. Pourtant féru de littérature fantastique, je n'en avais jamais entendu parler, et je suis passé à côté d'un conteur hors pair. Blackwood n'a pas son pareil pour distiller des atmosphères étrangement envoutantes, où quelques gouttes d'enfer ont été glissées dans un écrin de paradis. Ce recueil de nouvelles pour cadre les forêts canadiennes et en reprend quelques légendes amérindiennes et québécoises. La traduction est fluide et limpide, et je me suis laissé entraîner sur les sentiers de la chasse là où le pas de l'ours ou du loup supplante de loin celui de l'homme. Blackwood annonce généralement la couleur dès le titre, et on ne comprend pas d'emblée où est l'horreur ou l'épouvante dans ses histoires de chasse. Son art consiste à nous placer dans un entre-monde à la lisière du fantastique, à instiller le doute jusqu'à briser le barrage de notre pensée rationnelle pour nous plonger dans un univers de pure folie. le monstre sans cesse se dérobe aux regards, ce qui le rend d'autant plus angoissant. Ce qu'il tait est aussi important que ce qu'il dit, ce qu'il dévoile est en-deçà de ce qu'il laisse dans l'ombre. Un véritable plaisir de lecture.