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Critique de myrtigal


J'avais découvert cette petite collection « SeuilLibelle » des éditions Seuil avec ma précédente lecture "Pour une télé libre : Contre Bolloré" de Julia Cagé. Une collection qui a pour but « d'accueillir des textes courts d'auteurs engagés creusant l'information et devançant les polémiques » créée pour « pallier l'érosion du débat public en proposant des réponses argumentées ».
Une idée que je trouve salutaire et nécessaire, ayant effectivement constaté (comme beaucoup) la dégradation, voire l'hystérisation, du débat public.

Pour cet ouvrage, l'auteur Romain Blondeau, critique et journaliste, fait le choix de nous parler de la plateforme la plus célèbre du monde : Netflix.
Il nous explique comment cette entreprise, pourtant crée il y a 25 ans, a connu en l'espace de ces 10 dernières années seulement un boom absolument stupéfiant en passant d'un obscur site de location vidéos au géant écrasant à +200 millions d'abonnés.
Ce qu'on apprend grâce à l'auteur c'est qu'au début lorsque l'entreprise est passée à une offre dématerialisée et qu'ils ont commencé à produire leurs propres fictions, puisqu'il n'y avait forcément aucune attentes, leurs premières créations avaient non seulement une certaine originalité mais aussi pas mal de potentiel. Tout change lorsqu'en 2017 la série La casa de papel devient un phénomène mondial et amorce le début d'un changement radical de la plateforme. À partir du moment où ils comprennent ce qui marche et pourquoi, exit tout originalité ou même diversité de styles, dorénavant tout se ressemblera. le but étant maintenant de capter et garder l'audience. Et comme l'a cyniquement déclaré l'un des dirigeants du site « notre seul concurrent est le sommeil ». Et donc pour garder le spectateur accro à la plateforme, non content d'uniformiser le contenu d'un point de vue artistique et scénaristique (schéma narratif toujours semblable, cadrages toujours semblables), ils vont à côté de cela mettre en place différents petits éléments sournois dans le but de nous garder présents le plus longtemps possible : épisodes qui s'enchainent sans qu'il y ait besoin de cliquer sur un bouton, suggestions infinis du catalogue, possibilité de visionner le contenu en accéléré, etc. Bref, comme l'explique très bien l'auteur : du capitalisme attentionnel.
C'est assez édifiant à lire. C'est quelque chose que j'avais commencé à constater — comme beaucoup d'autres surement — mais le lire ainsi expliqué avec détails, décryptage et argumentation rend les choses encore plus frappantes.
Ce qui est également intéressant c'est que l'auteur va faire un parallèle avec Emmanuel Macron, dont le début de quinquennat coïncide exactement avec l'explosion de la plateforme en France. Un homme et une plateforme dont les valeurs néolibérales se rejoignent parfaitement.
Romain Blondeau termine avec un plaidoyer pour le cinéma, qu'il nous enjoint à ne pas délaisser ni oublier, et même à se remémorer ce qu'il nous procurait jadis.

C'est un essai très très court, 60 pages, c'est concis, précis, éclairant. Les médias, l'internet et le numérique sont des sujets qui m'intéressent énormément car je trouve que les nombreuses dérives qui en découlent (sans nier leurs avantages) sont devenus tels qu'il nous faut d'urgence réfléchir à notre utilisation, à ce qu'ils font de nous et poser un regard distancié et critique. Et fort heureusement il existe beaucoup d'auteurs pour nous aider à cela.
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