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Critique de Fleitour


Il est rare de lire un livre autobiographique de cette qualité. La qualité de l'écriture et du récit éclaire la vie d' Adélaïde Bon, en un lumineux récit, comme pour un spectacle, un éclairage qui permet de mettre en valeur l'intention de l'auteur.

Bien des écrivains, ont la certitude d'être lu, avec attention jusqu'au bout, mais cette voix si jeune et si sombre, cette douleur qui tétanise, l' écouter pour lui offrir ce joyau, votre lecture, lire ses mots tous ses mots, de "la petite Fille sur la Banquise".


Ici pour un premier roman se rendre visible, ne rien cacher d'essentiel, est une démarche qui me bouleverse. Faites comme tous ceux qui ont croisé Adélaîde, son journal, cette confession livrée à ses cahiers bleus, griffonnés pour qu'elle n'oublie pas, pour qu'elle retrouve les traces de ce jour maudit où son regard a croisé un prédateur aux yeux glacés.


"Elle n'est plus là. Elle est morte."P 12
C'est le corps qui parle, ce sont les sens qui relient la petite fille à la vie. Là haut, dans sa tête, quelqu'un a tout effacé, il ne reste qu'une douleur sans nom, une nausée, des gestes automatiques, c'est moi qui suis sale, honteuse, comment vivre ça.
C'est semblable à un deuil, la perte à 8 ans de la maman les sensations sont les mêmes, elle n'est plus là, je suis morte, incapable de dire de pleurer, dans ce no man's land, “ça flotte dit elle". page 12

Beaucoup plus tard elle dira enfin:
“Quelqu'un lui a fait du mal, quelqu'un lui a fait ce mot là. Et si la clef c'était ce mot là .P 105”

Elle découvre qu'elle n'est pas seule qu'il faut se battre, que le corps a quelque chose de si précieux.
Toutes les peurs, toutes les angoisses s'incrustent dans la peau.


Une fois ouvert le chemin de sa rédemption, le procès, la naissance de son premier enfant, Adélaïde Bon nous immerge dans le dédale de la réalité de la condition féminine, non pas celle des comptes dorés, mais celle des violences que subissent les femmes. Fossé d'incompréhension ou manque d'information, le chemin qui mènera les hommes à respecter enfin le corps des femmes semble si abyssal.


Témoigner, devient sa litanie elle écrit page 246, "sans nos témoignages tremblants, nos voix qui se rompent, nos visages tirés de larmes contenues, sans nous, l'horreur du crime s'estompe et le criminel triomphe".

Le sentier est encore long, qu'importe!
"15 000 € pour le viol, on peut détruire la vie d'une femme pour le prix d'une voiture d'occasion."p 247

Dans la sinuosité de ce parcours chaotique, se cache un mari aimant, il ne comprend pas tout mais qu'importe! Il est là aussi, il est là, il la soutient même quand elle revit le drame et qu'il s'épuise de sa tendresse.

La force de ce roman est porté par cet amour, discret, efficace, démesuré.

Adélaïde n'abandonne pas, jamais les mêmes dans les ténèbres, la vie, elle luit.

Cette joie elle est capable dans les dernières pages de nous la faire partager, charnellement avec le feu d'artifice de tout son corps, à pleines dents, page 252 ," l'odeur des aiguilles de pin roulées au bout des doigts, dans mes paumes, la chaleur vibrante et moire d'une poignée de terre grasse."

Un quelque chose d'inoubliable.
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