Et si l'homme, le sexe masculin, était seul responsable de la situation écologique alarmante que nous vivons ? C'est ce qu'affirment Sandrine Rousseau et ses co-autrices Adélaïde Bon et Sandrine Roudaut dans un essai paru fin août, "Par-delà l'Androcène". L'environnement serait-il une affaire de femmes ?
#androcene #genre #ecofeminisme
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Elle a le cœur chaviré par sa tendresse, sa sensibilité.
Il est amoureux et ses mains peu à peu l'apprivoisent, la rassurent.
p 55
Je suis ce qu’il reste d’une femme après qu’on l’a violée. Et de l’écrire me renoue, me relie, me répare.
Sourire, dissimuler, s’épuiser. Passer chaque journée en dehors de soi. Se vivre déportée, sans que nul ne sache. Elle rit toujours, peut-être un peu plus qu’avant, c’est qu’elle a le cœur si lourd que quand la joie lui vient, elle s’y jette.
Les agresseurs sont des lâches. Je ne comprends pas notre fascination pour les coupables. Plutôt que d'écrire des romans, des séries, des émissions à sensation sur le parcours des criminels, plutôt que d'en faire des monstres pour nous rassurer sur notre propre humanité, on devrait élever des statues à chaque pas de porte, écrire des biographies, des scénarios, faire des cortèges, des chansons, des fêtes, des jours fériés pour célébrer le courage de centaines de millions de victimes que personne n'a jamais écoutées et qui chaque soir parviennent encore vivantes au terme de leur journée, abandonnées, abattues et si terriblement seules.
Les mots dessinent l'horizon de nos pensées, alors quand les mots mentent, quand on remplace ennemi par ami, violence par plaisir, viol par attouchement, pédocriminel par pédophile et victime par coupable, l'horizon est une ligne de barbelés qui interdit toute sortie du camp.
Le juge lui demande quelles conséquences les faits ont eues sur sa vie. Elle énumère quelques méduses, mais elle n'a pas de mots pour raconter ce que c'est, ce que ça vous fait, année après année, vivre à l'envers. Ne rien confier à ses parents, à ses frères et soeurs, à ses amies. Se couper des autres. Sourire. Dissimuler. S'épuiser. Passer chaque journée en dehors de soi. Se vivre déportée, sans que nul le sache.
Est-ce qu'elle s'est essuyé la bouche du revers de la main,passé la langue sur les dents ,recoiffėe un peu? Est-ce elle où lui qui a remonté la culotte,remis un semblantvd'ordre dans la robe-tablier rouge ,tiré sur le chemisier blanc?Elle le regarde en opinant du menton,comme les petits chiens qui hochent la tête sur les plages arrière des voitures.Je suis gentille,je suis jolie,j'aime ça, tu es mon ami,tu aimes mes grosses fesses,tu me fais du bien ,je suis gourmande ,je ne dirai rien,c'est notre secret,je te promets ,je ne dirai rien.Des mots qu'il lui a dits et dont elle ne se souvient pas,pas plus qu'elle ne se souvient de ce qu'il lui a fait.
Elle ne collectionne plus les mots, en cours de grec ancien, elle apprend à les décortiquer, à suivre leurs racines qui s'enchevêtrent à l'histoire des hommes.
Un jour, elle comprend, stupéfaite, "pédophile". Quelqu'un qui a de l'amitié pour un enfant. Une phrase lui revient brutalement en mémoire, une phrase comme une gifle, une phrase à l'envers, une phrase du monsieur de l'escalier.
"Je suis ton ami". [...]
Si elle découvre alors que certains mots signifient l'inverse de ce qu'ils prétendent, elle ne se demande pas encore pourquoi on a choisit d'utiliser précisément ceux-là.
Elle note les mots dissociation, conduites à risques, conduites d'évitement, attaques de panique, violences que l'on s'inflige à son corps défendant, cauchemars répétitifs, sensations de pénétration, elle note, À tous ces symptômes, les victimes ne comprennent rien. Plus on a été agressé jeune, plus on a de mal à voir le rapport entre la crise de panique au présent et l'agression du passé.
Elle note avec avidité mais elle non plus, elle ne voit pas le rapport.
Elle est vive et enjouée en compagnie et des qu' elle échappe aux regards elle mange. Elle rit toujours, peut être même plus qu' avant, c est qu' elle a le coeur si lourd que quand la joie lui vient, elle s y jette.