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Critique de Levant


"Curiosité malsaine ? Obsession Morbide du passé ? Fascination enfantine pour les secrets de famille ?" Dans Mes vies secrètesDominique Bona s'interroge sur son affinité à la rédaction de biographies. Elle en a publié un grand nombre. Un entretien avec François Nourissier la déstabilise. L'éminent critique lui pose la question d'emblée, en guise de salutation : pourquoi avoir abandonné le roman au profit de la biographie ?

Le roman, univers de l'imagination sans frontière, du rêve, de la chimère, genre majeur de la littérature quand la biographie doit se cantonner à la vérité, si ce n'est à l'exactitude. Quelle grandeur dans la restitution d'un parcours de vie, semble l'interroger François Nourissier ?

C'est à cette question que Dominique Bona tente de répondre dans ce très bel ouvrage : Mes vies secrètes. Une partie de la réponse est selon elle dans le choix des personnages qu'elle a fait pour en dresser la biographie. Car, nous fait-elle comprendre, il en est dont la vie est un véritable roman tant la réalité de ce monde semblait ne pas s'imposer à eux. Qu'ils aient été acteurs ou victimes de cette réalité, ils rayonnaient par leur talent à contrer la fatalité ou à composer avec elle. Laissant derrière eux l'illusion d'avoir leurré "les forces de la nuit."

Mes vies Secrètes c'est tout sauf une justification, c'est une biographie des biographies, une biographie de la séduction pour un personnage qui a présidé à chacune de ses entreprises. Avec à chaque fois, selon Dominique Bona, l'espoir d'identifier les ressorts qui ont animé la personne choisie pour qu'il devienne aux yeux du monde un personnage. L'espoir de détecter "ce qui est mystérieux dans une existence, ce qui est en dehors des champs du raisonnement, de la logique." Si "le roman cultive le mentir-vrai … la biographie ne peut pas mentir. Elle repose tout entière sur le vrai ou tente de s'en approcher … ce vrai est le diamant brut du genre, son trésor, son orgueil."

Rédiger une biographie s'apparente à l'art de la sculpture qui à partir du monolithe brut le débarrasse de ses scories, dégrossit, arrache les éclats, affine, polit les formes pour finalement offrir à la lumière les traits du personnage qui se cache au creux du bloc, et restituer ce que le temps à tendance à enrober de la gangue de l'oubli. Sachant bien qu'aussi figurative soit l'oeuvre, le sujet conservera toujours cette part d'ombre que chacun emporte avec lui dans l'au-delà.

Si j'en juge par la qualité de cet ouvrage intimiste de Dominique Bona, j'augure que les biographies de son cru, qu'il m'engage à découvrir, savent restituer plus que l'apparence des sujets qu'elle a choisis pour en dresser le portrait. J'augure qu'à l'instar des oeuvres d'une Camille Claudel - laquelle a fait partie de ses sujets, les biographies de Dominique Bona, plus que restituer le portrait de ses modèles, savent suggérer au lecteur une part de ce mystère qui habite tout un chacun, un mystère d'autant plus ensorcelant que le personnage a fait lui-même de sa vie une oeuvre.

Mais au final, s'intéresser à la vie des autres n'est-ce pas se chercher soi-même dans le miroir de leur destinée ?
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