"Si ces gestes gratuits, donnés par des inconnues comme par des amies, deviennent inoubliables au regard des violences gratuites qui structurent le monde totalitaire du camp de concentration, c'est peut-être parce qu'ils revigorent la pulsion de vie. Indéniablement, c'est dans la tendresse que les femmes vont chercher la force de survivre. Que celle-ci soit maternelle, sororale, érotique ou provenant de l'amie de cœur, elle est un atome agissant de la puissance d'amour dont parle Odette Abadi."
"On voit ici à quel point Jacqueline Fleury a la sensation de vivre avec ses compagnes quelque chose de nouveau et d’inconnu pour lequel il n’y a pas encore de mot. Sororité conviendrait-il ? Ce serait l’équivalent de fraternité vu du côté des sœurs. Apparemment non, car l’échange politique, le combat commun pour la liberté de son pays, sort des relations familiales qu’elles connaissent où, pour les femmes, la famille est synonyme d’exclusion de la Cité. Depuis la Révolution française la sphère du politique est d’essence masculine et réservée aux citoyens mâles. La sphère familiale, le monde féminin par excellence, celui des naissances, des morts et des enfants où pourrait se construire une « sororité » qui soit l’équivalent de la fraternité républicaine ne débouche pas sur la citoyenneté."
Se vivre comme conscience isolée ou être désafilliée à la culture commune est la pire menace qui soit pour l'intégrité psychique.