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Critique de Sharon


Je voudrais déjà lancer un avertissement : si vous croyez vous trouver en face d'une banale histoire de famille, dans laquelle l'auteur se contente de broder autour des mariages, naissances et décès, avec passage obligé par des événements historiques, passez votre chemin. Antoine et Isabelle est bien plus qu'un simple hommage à ses grands-parents.
Le livre commence presque par la fin : d'entrée de jeu, nous savons que le grand-père de Vincent sera déporté, qu'il en reviendra, et qu'il écrira le récit de ce qu'il a vécu. Pourtant, Vincent Borel ne nous parle pas de devoir de mémoire, loin de là, et je préfère le citer que le paraphraser : "je lui cède la parole. L'horreur qu'Antonio va connaître à Mathausen [...] il n'appartient qu'à ceux qui l'ont vécue de l'évoquer. S'y substituer ne serait, au mieux, qu'une machine littéraire". Aussi, j'ai beaucoup apprécié, même si j'ai toujours des difficultés avec cette période, que Vincent Borel reproduise in extenso l'oeuvre de son grand-père et que le temps de la lecture corresponde avec le temps du récit.
Mais revenons en 1919. Nous sommes en ESpagne, et nous suivons le destin des Vives et des Canuto. Les deux familles ne se connaissent pas, pourtant elles ont en commun de vouloir vivre une vie meilleure que celle qu'elles vivent. Elles se retrouvent toutes deux à Barcelone, dans des conditions à peine meilleures que celles qu'elles ont quitté. Leur point commun ? Elles arrivent toutes deux à Barcelone, où Antonio, serveur, rencontrera Isabel, ouvrière, et où ils se marieront, en dépit de l'opposition d'une des familles. Tout au long de ses années, ils feront preuve de courage et d'opiniâtreté, d'engagement dirait-on aujourd'hui, face au épreuves et au qu'en dira-t-on ?
J'ai pensé à l'oeuvre de Zola en lisant ce livre. Comme dans Germinal, nous avons, en opposition à ses ouvriers qui cherchent à survivre (à défaut de pouvoir toujours vivre) une richissime famille bourgeoise, les Gillet dont nous suivrons le destin parallèlement à celui des Vives. Pourquoi Germinal ? Comme les Grégoire, Léonie a une vision très patriarcale du rôle des patrons envers les ouvriers. Il est nécessaire de prendre soin d'eux, d'une part parce qu'ils en sont incapables (tous alcooliques) et d'autre par pour prévenir toute velléité de révolte. Rien n'a changé depuis Zola. Au-delà des différences (de nationalité, de classe sociale, d'opinion politique), ils sont pourtant un point commun avec les Canuto (les parents d'Isabel) : le souci des convenances et le respect de la religion. Pas de divorce pour les uns, pas d'enfant naturel pour les autres. Tous les chapitres consacrés aux Gilet et à leurs descendants m'ont peu passionné, et il m'est arrivé de remettre leur lecture à plus tard, tant je voulais savoir ce qu'il adviendrait d'Antonio et Isabelle.
J'ai tout de même un autre regret : le ton utilisé, distant, impersonnel, comme si l'auteur ne voulait pas manifester son émotion face au destin de ses grands-parents. Il faut attendre la guerre d'Espagne, magnifiquement raconté (et pourtant, rien n'était simple dans cette guerre) pour trouver un souffle épique.
Antoine et Isabelle reste cependant un roman solidement construit, très bien documenté sans être pesant, et hautement recommandable pour tous ceux qui s'intéressent à la guerre d'Espagne et à la seconde guerre mondiale.
Lien : http://le.blog.de.sharon.ove..
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