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Citations sur Voleur, espion et assassin (24)

Le vol était devenu le fondement du contrat social en Union soviétique, un contrat tacite entre le pouvoir et les gens. Le pouvoir n’était pas en mesure de lutter contre le vol de masse et, au fond, il s’y était résigné, laissant les gens satisfaire leurs besoins en contournant la loi afin de préserver cette fiction qui s’appelait le socialisme.
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« Ossip, domestique, tel que sont d’ordinaire tous les domestiques d’âge assez mûr. Il parle avec componction, garde les yeux baissés, c’est un raisonneur et il aime se faire la leçon à lui-même… » Qu’est-ce que c’était que ce charabia d’illettré ? Gogol… J’avais lu Les Soirées du hameau, mais c’était un autre Gogol. Là, il s’agissait d’une pièce. Mais je n’avais rien à faire et rien d’autre sous la main. Je me suis mis à lire. Au bout d’un quart d’heure, j’ai commencé à m’esclaffer, puis à me tordre de rire, et j’ai entrepris de lire la pièce à voix haute en interprétant chaque rôle, j’ai lu jusqu’à la scène muette de la fin, je suis revenu au début et j’ai tout relu, toujours à haute voix. Ce jour-là, j’ai bien dû lire Le Révizor au moins une dizaine de fois. Cela ressemblait à de la démence. Je courais à travers la chambre, je grimpais sur le divan, je faisais des grimaces devant la glace, et je hurlais : « Même dans les lettres, on m’écrit “Votre Excellence !”........ Et j’ai de nouveau relu la pièce, dans laquelle j’étais à la fois Ossip, Khlestakov, Gorodnitch, Zemlianika et Maria Antonovna, tous, absolument tous ces imbéciles et ces abrutis prodigieux qui, par leur monstruosité, s’élevaient jusqu’à des sommets de l’univers dont je ne soupçonnais même pas l’existence.
Le soir, ma mère m’a trouvé dans un tel état d’excitation qu’elle a commencé par me donner de l’amidopyrine, puis du pyramidon, et quand elle a compris de quoi il retournait, elle a éclaté de rire : « Seigneur ! Alors ça y est, tu es arrivé à la littérature ! »
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Mon père disait toujours de la soupe aux choux de ma mère que c’était de l’ananas. Il n’avait jamais goûté d’ananas, il ne savait même pas à quoi ça ressemblait, mais dans notre petite ville, c’est ce que tout le monde disait quand on parlait de quelque chose de très, très bon. Le lard de Kalitine était de l’ananas.
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«  En Russie, on a toujours eu du respect pour les héros, mais ceux qu’on aime, ce sont les justes. Un héros, aujourd’hui, il accomplit un exploit, il sauve des camarades de la mort, il défend sa terre natale, mais quand il rentre à la maison, il bat sa femme et en plus, après, il vole, il ment, il commet des horreurs. Les héros, ce sont des gens d’une seule fois. Le monde repose sur les justes, et pas sur les héros. »
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La volonté collective d’atteindre le bien donne naissance au mal, et l’absence de volonté collective rend le mal impossible à vaincre.
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Une liste de péchés mortels, c'est pas seulement la liste de tous le mal et de toutes les saletés dont les hommes sont capables, c'est aussi la liste des capacités humaines.
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J’ai pris un livre que j’avais apporté de la bibliothèque la veille, et j’ai lu :


« D’aucuns l’appellent vie, mais est-ce un nom

Pour elle ? Elle est un songe et une veille,

Un entre-deux où la folie se fond
Dans une clairvoyance sans pareille.

L’homme, au sommet de ses moyens, se voit

Pris, vague à vague, sans savoir pourquoi,

De visions pressées, impérieuses
Qui l’assaillent sans cesse, il est rendu,

Pourrait-on croire, à sa tumultueuse

Naissance, au gouffre du tohu-bohu.

Mais quelquefois, dans un surcroît de flamme,

Il voit ce qui se cache aux autres âmes. »

(La Mort ultime, d’Evgueni Baratynski, trad, André Markowicz, Le Soleil d’Alexandre, p 269, Actes Sud, 2011.)


Ce poème-là ne racontait pas d’histoire. Et pourtant, ce soir-là, chaque mot m’était intelligible, je comprenais la musique envoûtante des mots et la musique envoûtante des pensées, et Dieu sait pourquoi, tout cela me causait une tristesse amère et de la souffrance.
Je me suis levé d’un bond, j’ai vérifié qu’il n’y avait personne derrière la porte, j’ai relu le poème encore une fois, et j’ai éclaté en sanglots, j’ai sangloté, sangloté à n’en plus finir…

Et comme ces larmes étaient douces, comme elles étaient grisantes !

Comme c’était bien, comme c’était lumineux de pleurer !
 Quel désespoir radieux, Seigneur !
Jamais plus de ma vie je n’ai pleuré comme ça.
p 105-106
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La rédaction (du journal régional pour lequel l'auteur travaille) recevait des vers envoyés par des élèves des grandes classes, par de vieilles enseignantes solitaires ou des détenus de la prison locale, qui écrivaient des poèmes sur l'amour pour la patrie, pour les bouleaux, et pour les jeunes filles patientes.
"J'ai grimpé sur la montagne,
J'ai crié à ceux d'en bas :
Oui, j'le vois, oui j'le vois,
Il arrive, le communisme."
Ce quatrain, envoyé par un détenu de soixante-dix-sept ans qui avait écopé de quatorze ans de prison pour les meurtres de sa femme et de sa maîtresse, je ne l'ai jamais oublié. On ne l'a pas publié -- il y avait un problème avec les rimes. p 198-199
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p 65 Le camion (de Kolia-Le-PoidsLourd) finit quand même par être envoyé à la retraite, lui-aussi, mais on l'autorisa à faire office de corbillard jusqu'à ce qu'il rende l'âme.
Le jour des funérailles, on rabattait le panneau arrière, on plaçait le cercueil avec le défunt dans le camion, les membres de la famille se mettaient en rang derrière, suivis par un orchestre dirigé par un Demi-Litron éternellement ivre, puis le cortège se mettait en place -- des petites vieilles en jaquettes pelucheuses venues se familiariser avec la mort, des voisins, la Pétardière, notre perturbatrice, vêtue d'un manteau avec un col taillé dans la peau d'un animal inconnu, nos "irréparables", des poivrots qui espéraient s'en mettre plein la lampe au repas de funérailles, le débile Vitia Smolokourov et la débile Liza-de-tout-le-monde, des chiens errants, et une chèvre en vadrouille avec une touffe d'herbe entre les dents.
Parfois le moteur du camion calait, et il fallait pousser le véhicule. La famille, les voisins et les débiles s'y mettaient tous ensemble, Kolia jurait, l'orchestre jouait quelque chose de revigorant, les chiens errants aboyaient, la chèvre bêlait désespérément, puis le moteur finissait par pétarader et rugir, et la procession se remettait en marche.
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En mai 1970, alors qu’on célébrait les vingt-cinq ans de la victoire et que tous les hommes de la ville étaient ivres morts, j’ai dit quelque chose de méprisant à propos de « ces héros », et grand-mère a fait la remarque suivante : « En Russie, on a toujours eu du respect pour les héros, mais ceux qu’on aime ce sont les justes. Un héros, aujourd’hui, il accomplit un exploit, il sauve des camarades de la mort, il défend sa terre natale, mais quand il rentre à la maison, il bat sa femme et en plus, après, il vole, il ment, il commet des horreurs. Les héros, ce sont des gens d’une seule fois. Le monde repose sur les justes, et pas sur les héros. »
Peu avant sa mort, en réponse à mes péroraisons sur « notre pays sans liberté », elle m’a dit : « La liberté, c’est toi. Seulement, n’oublie jamais que la prison aussi, c’est toi. » Elle n’aimait pas non plus quand on qualifiait quelqu’un de « conscience du peuple ». «La conscience, c’est Dieu à l’intérieur de l’homme. Un peuple, ça n’a pas de conscience, seul un homme a une conscience. C’est par cela que l’homme se distingue de la bête — par la conscience. Mais, la conscience du peuple, ça, ça a été inventé par des gens sans conscience. » p 134
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