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Critique de Carolina78


Que diable suis-je allée faire dans cette galère ?

L'autoportrait de Sarah Saudkova, photographe tchèque, femme à l'allure masculine avec des seins généreux qui s'exhibe en train de se faire mordre par un nourrisson, ainsi que le titre, Né d'aucune femme, tiré de MacBeth, m'ont intriguée.

Les éloges dithyrambiques sont légion sur Babélio, si bien ils sont contrecarrés par certains avis tranchés qui dénoncent une violence nauséabonde.

Né d'aucune femme démarre par deux chapitres « l'homme » et « l'enfant » qui ne prennent leur sens qu'à la fin de l'ouvrage. C'est dans le troisième chapitre « Gabriel » que nous entrons dans l'action. Gabriel est un vieux curé qui se souvient du jour où une inconnue est venue le prévenir qu'il allait être appelé à bénir une femme à l'asile de fous, et lui demander de récupérer les cahiers de Rose cachés sous la robe.

Rose est vendue, à l'âge de quatorze ans, par son père à un maître de forges qui vit reclus dans son château avec sa mère. Ils forment un couple de tortionnaires, qui non seulement vont réduire Rose à l'esclavage, mais en plus, vont lui faire subir des sévices sexuels et des actes d'une cruauté inouïe.

Le début est assez plat. La violence n'arrive pratiquement que vers le milieu du livre. J'étais prévenue ! Je m'attendais à affronter l'insoutenable, mais il n'y a pas eu de choc, car pour exprimer la souffrance il faut l'avoir vécue ! J'ai trouvé toutes ces pseudos horreurs excessives et caricaturales !

À la fin, tout prend un sens, ou plusieurs sens, tout s'emboite. C'est, à mon avis, le charme de ce livre : mélange de réalisme social, de fiction et de surnaturel. À ce propos c'est dommage qu'on ne puisse pas discuter, sur Babélio, entre lecteurs qui ont lu les livres.

Né d'aucune femme est construit comme un conte avec un ogre (le maître des forges), une sorcière (la mère de l'ogre), un pseudo prince charmant (Edmond). Il fait référence au Petit Poucet. C'est un huis clos oppressant qui nous ménage quelques bouffées d'air : l'amour, la jument Artémis, les épaules d'Edmond…

C'est un récit polyphonique où s'alternent le journal de Rose, les points de vue des parents de Rose, Onésine, le père, « elle », la mère, les pensées d'Edmond, le palefrenier, et de Gabriel, en introduction et en conclusion. Nous ne saurons, qu'à la fin, qui sont « l'homme » et « l'enfant ».

Contrairement à la plupart des babéliotes, je n'ai pas été éblouie par le style. Rose est inculte, elle écrit comme elle pense, sans négations, sans ponctuation pour séparer les dialogues de la narration. Par contre, le choix des mots est tiré au cordeau, avec une précision d'orfèvre. Plusieurs passages sont une ode au pouvoir des mots qui créent l'histoire, décident, consolent, libèrent, font rêver…

Né d'aucune femme est une expérience dérangeante où Franck Bouysse se met à nu moralement, où il gratte pour enlever le vernis social, creuse jusqu'à exhumer la bête humaine, pour aller au bout du mal (du mâle comme il dit).

Ma curiosité a été satisfaite par cette rencontre singulière mais je ne récidiverai pas avec cet auteur.
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