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Critique de domi_troizarsouilles


Mais quelle lecture pénible ! Selon le mot d'ordre à la « bienveillance », actuellement très à la mode, je ne vais pas lancer des tomates sur ce livre, je vais plutôt préférer dire qu'il ne m'a pas convenu… mais c'est au point que, si je ne m'étais pas engagée à le lire dans le cadre d'un challenge en équipe, je l'aurais abandonné après quelques pages seulement ! Pire : dans mon enthousiasme pour ledit challenge, j'avais carrément acheté les trois premiers tomes de cette série – heureusement à prix modique et en occasion, ces livres n'étant pas disponibles en format Kindle, mais je n'ose imaginer comme j'aurais râlé si je les avais payés au prix plein dans une autre édition qu'en poche ! J'ai commencé par le n° 2 pour les besoins dudit challenge, je n'ai à aucun moment été gênée par le fait d'avoir manqué le premier tome (ou alors sans m'en apercevoir), reconnaissons au moins ce mérite. Mais pour le reste…

D'abord, ce livre est prétendument un Policier… mais l'enquête policière n'est qu'un vague prétexte qui se dilue dans une toute autre histoire : une tranche de vie, véritable mini-biographie d'Oscar Wilde. C'est sans doute intéressant… mais quand je choisis de lire un polar, c'est pour lire un polar, pas une biographie déguisée, dans laquelle l'enquête se noie à peu près complètement. J'ai lu certains commentaires disant que la résolution est évidente ; moi je l'ai trouvée alambiquée, mais de toute façon sans aucun intérêt – oui, vraiment : un prétexte alléchant pour écrire tout autre chose, et cette autre chose ne m'a absolument pas séduite !

Pour tout dire, à la base, je ne suis pas fan de l'époque victorienne… Certains la vantent, la louent, comme une époque extraordinaire : vraiment ? Les hommes plus ou moins fortunés passent leur temps de bar en restaurant, cigarette ou cigare au bec, à goûter les meilleurs vins tout en discutant de qui est gentleman ou pas, tandis qu'ils méprisent « le peuple » (et les personnes de couleur) avec une telle condescendance que ça en est indécent. Les femmes sont présentées comme de pauvres petites choses, jolies à 20 ans, corsetées avec tous les désagréments (et risques !) que cela suppose, puis laides et grosses passé leurs grossesses – et si c'est vrai (j'en suis un exemple vivant), c'est particulièrement malséant dans la bouche d'un dandy décrit lui-même comme mou et obèse ! Elles ont droit à leurs premiers magazines féminins… dont les rédacteurs en chef sont des hommes ! L'homosexualité est un crime, punissable de plusieurs années de travaux forcés ! Dois-je continuer ?...

Soyons juste : on peut reconnaître au moins un atout à ce livre, pour qui aime cette époque (et qui me trouvera sans doute bien des arguments pour la défendre ;) ) : l'ambiance propre à l'entourage d'Oscar Wilde est sans aucun doute bien rendue. Tous les éléments y sont, quoi qu'on en pense, entre les moyens de transport tels que cabs ou fiacres, les pièces de théâtre qui avaient alors du succès (ou pas), quelques inventions intéressantes (comme les serrures de toilettes publiques que l'on peut ouvrir avec une pièce d'un penny, ou la mise en place de règles pour la boxe !), et j'en passe. le tout a un ton définitivement désuet, résolument voulu. le personnage principal peut être vu comme adorable par ceux qui l'apprécient, mais profondément arrogant et agaçant pour les autres – dont moi. Je n'ai jamais lu que des extraits de ce qui est considéré comme son oeuvre majeure, et jamais par choix : c'est lors de mes études en traduction que j'ai eu l'un ou l'autre cours sur le sujet, et sur les différentes traductions (en français) dont ladite oeuvre a déjà fait l'objet. Rien de tout cela ne m'a jamais convaincue… mais bon, c'est ainsi : je ne suis pas lectrice de « classiques » quels qu'ils soient, et si je me risque parfois à en lire l'un ou l'autre pour ma culture, ce n'est jamais avec grand enthousiasme, et Dorian Gray me tente encore moins que bien d'autres romans d'avant la fin du XXe siècle !

Cela dit, bien au-delà d'une certaine ambiance qu'elle parvient à créer, ce genre d'écriture qui prétend « faire d'époque » présente un problème majeur. Ainsi, tout en retraçant une biographie en lieu et place de l'enquête espérée, l'auteur use et abuse d'un style ampoulé et désagréable. Dès les premières pages, j'ai spontanément pensé à ce bon vieil adage que les anciens de mon village répétaient autrefois quand l'un ou l'autre de la bande de jeunes dont je faisais partie voulait, sans le savoir, faire part de ses maigres connaissances avec cet air supérieur que seule l'adolescence pardonne : « La culture, c'est comme la confiture : moins on en a, plus on l'étale. » Bon, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit, en l'occurrence : je ne porte ici aucun jugement sur la culture de Gyles Brandreth, il est clairement passionné par Oscar Wilde et tout ce qu'il raconte sur cet auteur irlandais devenu personnage, ainsi que sur ses fréquentations bien réelles qui trouvent aussi leur place dans ce livre (dont le très insipide narrateur, Robert Sherard), repose sur des faits avérés et vérifiables.
Mais alors, qu'est-ce qu'il étale !... On en a jusqu'à l'indigestion, de cette confiture victorienne, et ça n'en finit pas, et ça dégouline à coups de citations de divers auteurs qu'Oscar Wilde semblait apprécier (dont beaucoup de Shakespeare) – ou pas, renvoyant à autant de notes de bas de page qu'on ne compte plus, sans parler des nombreux italiques « en français dans le texte ». C'est lassant, c'est répétitif et sans surprise, c'est interminable !

Non, décidément, rien ne m'a vraiment plu dans ce livre et, si je ne lui donne pas une note désastreuse, c'est parce que je crois malgré tout que ça peut plaire à d'autres, qui seraient plus sensibles à l'époque mise en scène, plus familiers de (et séduits par) le personnage principal, ou moins regardants face à la quasi-absence de réelle intrigue policière.
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