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Critique de CS_Constant


Merci à Babelio et aux Puf pour l'envoi de cet ouvrage avec l'opération Masse Critique.

Je dois malheureusement dire que je n'ai pas été très convaincue par ce recueil d'informations insolites et disparates présenté sous forme de quiz et de petits exercices, malgré le travail de qualité qui a été effectué par les auteurs, ce que je reconnais sans problèmes.

à mon sens, il y a dans ces miscellanées de culture générale plusieurs choses qui clochent, à commencer par le titre, que j'estime trompeur, car il ne s'agit pas de questions de culture générale, mais de questions essentiellement relatives à l'histoire, la mythologie, la littérature et aux arts, essentiellement occidentaux, ce qui en restreint encore le champ. Cela n'a rien de "général", c'est au contraire très particulier.

Cela soulève en fait un problème dont la portée va bien au-delà de ce seul livre, à savoir cette dérive sémantique qui fait que ce que l'on entend le plus souvent par "culture générale", c'est la culture littéraire et artistique occidentale. Qu'en est-il des sciences ? Sur plus de trois cent pages, on compte sur les doigts de la main les questions et exercices d'ordre logique ou mathématique, et encore, ils sont presque toujours reliés à des anecdotes historiques. Qu'en est-il des cultures du monde, des cultures minoritaires ?

Je n'ai rien contre le fait de ne parler que d'histoire et de littérature - d'ailleurs les auteurs sont des universitaires très qualifiés dans ces deux domaines, ce qui explique sans doute qu'ils ne se soient pas aventurés sur des plates-bandes qui ne sont pas les leurs - mais dans ce cas il aurait été plus juste d'intituler ce livre "Miscellanées de culture littéraire et historique". Je reconnais que c'est plus long et peut-être moins vendeur, du même coup, mais ce n'est pas une raison pour spolier le terme de culture générale.

à la décharge de ces derniers, j'ajouterai que l'expression est en fait galvaudée depuis longtemps, car on ne prend jamais en compte la culture scientifique quand on parle de culture générale. Sur ce sujet, je renvoie ceux que cette question intéresse à la lecture de "Liliane est au lycée", un ouvrage très intéressant de Normand Baillargeon sur le concept de culture générale.

Parlons maintenant du livre en lui-même. J'ai envie de dire que ça partait d'une bonne intention : prendre des sujets très pointus, que seuls des personnes ayant fait plus de cinq ans d'études pourraient normalement connaître, et les présenter sous forme de quiz et d'anecdotes amusantes pour les rendre ludiques et accessibles à un public le plus large possible. Je ne sais pas s'il n'y avait pas, à travers cet ouvrage, une volonté des Presses universitaires de France d'élargir son public à un lectorat non universitaire, mais c'est en tous cas l'impression que m'a fait ce livre : une tentative ratée de vulgarisation.

Car clairement, cela ne fonctionne pas. En tous cas pas pour moi. Et c'est peut-être le format question-réponse qui fait que cela ne prend pas. Si les choses avaient été présentées sous forme de petits articles, genre "le saviez-vous ?", il me semble que ma réception aurait été différente. Parce qu'avec ce choix de présentation, ce livre ne fait que nous poser des questions auxquelles on ne sait pas répondre. du coup, quand on lit la réponse, on n'est pas dans l'état d'esprit "je lis un texte pour me cultiver" mais "je lis la correction du devoir auquel je me suis complètement planté".

Je dis cela alors que j'ai toujours été très adaptée au système scolaire, alors je n'imagine même pas l'effet que ce livre doit faire à ceux qui sont dans le cas inverse. Il est scientifiquement prouvé que le cerveau mémorise mieux les choses quand il est dans de bonnes dispositions, et non soumis à la pression de la peur de l'échec. Donc pour moi, ce livre est une tentative de ludicisation et de vulgarisation assez maladroite : ce n'est pas parce qu'on fait un quiz que c'est ludique. Il faut encore pour cela qu'on ait un chance de pouvoir trouver la réponse. Sinon, on se sent nul et on se lasse, tout simplement.

Autant avertir le lecteur tout de suite : à moins d'avoir fait des études de lettres ou d'histoire ou d'être un fabuleux autodidacte, vous ne connaitrez jamais les réponses (Et encore, j'ai fait des études de lettres, ça ne m'a pas beaucoup aidée) Alors certes, le sous-titre "le livre le plus difficile du monde" laisse entendre tout cela avec un peu d'auto-dérision, et implicitement le fait que tout l'intérêt réside surtout dans les réponses. Mais ce n'est pas parce que c'est fait exprès que ça marche pour autant.

Partir sur une idée de quiz en laissant entendre que personne ne peut trouver les réponses, mais faire un quiz quand même, ce n'est pas une bonne idée. D'un point de vue symbolique, c'est faire semblant de vouloir démocratiser la culture tout en faisant perdurer une vision élitiste du savoir, où les détenteurs de ce dernier restent dans un petit entre-soi, un petit cercle d'érudits qui au lieu de partager simplement ses connaissances, rappelle d'abord sa supériorité avant d'abreuver le monde au puits de sa science. Je m'excuse pour cette analyse un peu radicale que tous ne partagerons sans doute pas, mais personnellement, ce livre ne m'a pas fait me sentir plus intelligente, ni plus cultivée, et je ne dis pas cela parce que je suis frustrée ou aigrie, car je n'ai absolument aucun complexe d'insécurité culturelle. Mais si ce livre s'adresse au grand public, je doute très sérieusement qu'il parvienne à toucher ceux qui peuvent avoir des problèmes de ce genre ; il risque au contraire de les complexer encore plus.

Concernant le contenu en lui-même, là encore, je suis moyennement convaincue. Certes, il y a beaucoup d'anecdotes et de faits intéressants, certains sont amusants et insolites, comme les mots issus du patois des bouchers ou les anciens noms obscènes de certaines rues parisiennes, ou encore le fait que l'arobase remonte à l'époque des moines copistes pour abréger le "ad" latin, mais, une fois de plus, selon moi, le format pose problème.

Je sais que les formats courts sont à la mode, mais ici, on a une avalanche de petites informations disparates et non contextualisées, qui font le plus souvent référence à des personnes ou des événements que nous ne connaissons pas ou peu. Ce n'est peut-être pas le cas de tout le monde, mais en ce qui me concerne, si je ne peux rattacher une information à aucun autre élément préalablement connu, ou à aucun élément de contextualisation qui me permettra d'en mieux saisir la portée d'une part cela ne suscite pas en moi un grand intérêt et je m'ennuie, et d'autre part, en conséquence, je ne l'enregistre pas.

C'est pour cela que je ne retiendrai sans doute que très peu de choses de tout ce que j'ai pu lire dans ce livre, et c'est bien dommage car en soi il contient beaucoup de choses intéressantes. Tout cela est très paradoxal, car on sent que ce format a dû être mûrement réfléchi dans l'objectif de faire passer au mieux la pilule de la démocratisation culturelle, mais c'est ce même format qui fait que cela ne fonctionne pas car il produit l'inverse de l'effet escompté.
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