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Critique de Bruidelo


Après la violence de la Semaine sanglante, la propagande anti-Communards reste très virulente. Haine de classe, volonté de justifier le caractère effroyable de la répression, ça y va et ça ne fait pas dans la dentelle: les Communards sont des sauvages, des animaux féroces, des êtres malfaisants sortis des égouts... Quant aux Communardes, comme l'écrit si délicatement Dumas fils, c'est seulement dans la mort que ces viles créatures sont susceptibles de retrouver apparence féminine :
« Nous ne dirons rien de leurs femelles par respect pour les femmes à qui elles ressemblent quand elles sont mortes. »

On comprend que la Communarde Victorine Brochet ait eu envie de faire entendre un autre son de cloche en écrivant ses «Souvenirs d'une morte vivante» (elle a été officiellement considérée comme fusillée pendant la Semaine sanglante). Un son de cloche qui résonne encore jusqu'à nous, grâce au documentaire de Raphaël Meyssian qui «rend hommage aux milliers d'inconnus prêts, à l'époque, à mourir pour la justice sociale» et à Yolande Moreau qui prête sa voix et redonne vie à notre «morte vivante».

Ses «Souvenirs» ne sont pas seulement ceux de la Commune, mais remontent à l'enfance, avec son père républicain et ses amis qui juraient sur la tête de la petite Victorine de lutter jusqu'à la mort pour sauver la République.
«Un frisson parcourait tout mon être, je croyais déjà porter la République sur mes épaules»
Son père est contraint à l'exil après le coup d'État de Napoléon III, comme sa fille le sera plus tard après la Commune.
Victorine parle aussi de la misère, des conditions de travail terribles:
«J'ai vu des pauvres femmes travaillant douze et quatorze heures par jour pour un salaire dérisoire, ayant vieux parents et enfants qu'elles étaient obligées de délaisser, s'enfermer de longues heures dans des ateliers malsains où ni l'air, ni la lumière, ni le soleil ne pénètrent jamais, car ils sont éclairés au gaz ; dans des fabriques où elles sont entassées par troupeaux, pour gagner la modique somme de 2 francs par jour...»
Elle est une des premières femmes françaises à adhérer à l'Internationale. Elle est déçue que les adhésions ne soient pas plus nombreuses:
«On s'était figuré que tous les ouvriers comprendraient bientôt que leurs amis, c'étaient tous les travailleurs du monde, et que leurs ennemis n'étaient pas les Allemands, ni les Anglais, etc., mais tous les exploiteurs à quelque nation qu'ils appartinssent».
Bien que le succès ne soit pas au rendez-vous, les poursuites commencent, les gouvernements comprenant mieux, d'après Victorine, «la puissance énorme que pourrait avoir une véritable Internationale».

Victorine Brochet raconte sa vie avec simplicité. Ce n'est pas une théoricienne, ni une élue de la Commune. Son nom de famille n'apparaît pas sur la couverture, l'auteur des «Souvenirs d'une morte vivante» garde un certain anonymat, c'est Victorine B., une femme du peuple, une militante de base, qui décrit un engagement inscrit dans le quotidien. C'est un témoignage précieux mais parfois, j'aurais eu besoin de plus d'explications et de mises en perspective pour combler mes grosses lacunes historiques.

Merci à Maxine (Ombre et Poussière) grâce à qui j'ai découvert ce livre, très différent de ce que je lis habituellement.
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