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Critique de liliba


Trois filles. Trois soeurs. Très différentes, mais qui malgré tout s'entendent bien – comme des soeurs. C'est-à-dire qu'elles se crêpent le chignon souvent, s'énervent mutuellement pour un rien, mais se comprennent aussi sans forcément avoir besoin de trop parler.

Les soeur ont la trentaine environ et reviennent les unes après les autres chez leurs parents, officiellement pour soutenir leur père, et surtout leur mère atteinte d'un cancer. Mais chacune d'elle a aussi ses raisons personnelles qu'il sera bien difficile d'avouer aux parents et aux deux autres, comme une honte cachée qu'on préfère taire, pour ne pas être jugée.

Les prénoms d'héroïnes des soeurs ont été choisis par leur père, fou de Shakespeare, mais les destins de ces femmes sont parfois lourds à porter pour de simples mortelles, bien que la famille soit totalement sous l'emprise du célèbre dramaturge anglais et que père et filles parsèment leurs conversations de références ou de citations, n'ayant d'ailleurs souvent pas d'autre moyen d'exprimer leur émotion ou leurs sentiments… Ainsi, Cordélia, qu'on appelle Cordy, est la fille du roi dans le roi Lear, Bean a pour prénom Bianca, issu de la mégère apprivoisée et Rosalind, que tous appellent Rose, est un prénom issu de Comme il vous plaira… Une ambiance cultivée, très lettrée même, qui donne au lecteur l'envie de relire quelques pièces du bon vieux William !

Rose est l'ainée et se sent responsable de ses parents. Elle habite d'ailleurs tout à coté de chez eux, travaille dans l'université du coin qu'elle n'a jamais quittée et la maladie de sa mère lui donne inconsciemment une parfaite excuse pour ne pas s'éloigner, et par-là ne pas suivre son fiancé en Angleterre, où il vient de trouver un poste en or pour sa carrière. Rose se sent res-pon-sa-ble ! de ses parents, de ses soeurs, de la bonne marche de la maison… elle fait peser sur ses épaules tout un tas de responsabilités et d'obligations qui sont en fait, on s'en aperçoit vite, des leurres pour ne pas s'affronter à sa propre vie…

Bean est la femme d'affaire, celle qui a réussi ses études et dégoté un bon job à New-York. C'est une fashion addict qui collectionne robes ou manteaux, attirée par le clinquant et l'argent. Un rien nympho, elle collectionne aussi les amants, qu'elle garde moins longtemps que ses paires de Louboutin… Mais Bean cache farouchement son secret que pour rien au monde elle ne voudrait avouer aux siens : elle a été virée de son boulot, prise la main dans le sac (Vuitton) en flagrant délit de vol avéré… La société, plutôt clémente, ne portera pas plainte pour les milliers de dollars détournés en falsifiant des chèques, mais elle doit rembourser au plus vite…

Cordy, la cadette, a quant à elle toujours été bohème et un peu follette, mais en tant que dernière de la famille, on lui a tout passé ou pardonné. Maladroite, brouillon et plutôt irresponsable, elle a brûlé sa jeunesse par les deux bouts, sillonné le pays, vécu dans des squatts et fumé moultes pétards. Elle a aussi eu des amants de passage, et d'ailleurs ne sait même pas vraiment qui est le père de l'enfant qu'elle porte, qu'elle arrive pour l'instant à cacher, mais qui finira par pointer son nez un jour ou l'autre sous ses grands tee-shirts…

Bref, chacune des soeurs a sa propre raison de revenir au foyer, en plus du devoir familial à accomplir pour soutenir leur mère dans sa bataille contre la maladie, et toutes les raisons de ne pas s'étendre sur son propre cas, par crainte d'être jugée par les autres. Elles sont toutes les trois attachantes chacune à leur façon, bien que toutes trois totalement immatures : on dirait plus des filles de 20 ans que de 30, pas trop capables de s'assumer et de faire face à la vie.

Le récit se fait tour à tour sur chaque soeur, d'une façon assez originale puisque c'est un « nous » de narration qui nous partage cette histoire familiale, que j'ai beaucoup aimé. On ne sait jamais vraiment laquelle des trois est la narratrice, on s'y perd parfois, mais cette forme narrative qui passe du « elle » au « nous » retrace bien ce qu'est une fratrie : on ne peut jamais quitter vraiment ses frères et soeurs et toujours, malgré nos différences et nos différents, malgré les hasards de la vie et des choix qui nous séparent, on fait partie d'un tout, d'un « nous » dont on ne peut pas se séparer.

A côté des caractères forts des trois filles, le père parait totalement à côté de ses pompes, perdu dans son Shakespeare adoré, mais la figure de la mère est belle, douce, courageuse et surtout d'une compréhension discrète vis-à-vis de ses filles, qu'elle aime sans les juger.

Il est dommage cependant que ce roman n'aborde pas plus l'environnement de la famille, la petite ville provinciale et ses coutumes, les traditions ou us du coin. En fait, on pourrait presque le transposer dans n'importe quel pays, tant il est peu décrit, de même que ses habitants, à part le pasteur du coin, bien trop séduisant pour être pasteur et quelques anciens copains retrouvés ici et là.

Malgré cela, c'est un joli roman sur une famille un peu branque, mais bien attachante, qui nous accueille dans son joyeux brouhaha et que nous côtoyons avec plaisir, mais je pense cependant pas que je garderai de cette lecture un souvenir impérissable.

Lien : http://liliba.canalblog.com/..
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