LE CIEL BLEU CIEL
Le jour où le Japon a perdu la guerre
Le ciel était d'un bleu dément
Le jour de la bombe atomique
Le ciel était d'un bleu vibrant
Le jour où j'ai perdu mes chers amis
Le ciel était d'un bleu tremblant
Le bleu du ciel
Est pour moi la couleur de la douleur
La couleur de l'extrême
"Ta couleur préférée ?"
M'avait-on demandé
"Bleu ciel"
Avais-je répondu, c'était le jour de mon entrée à l'école primaire
Ce jour où l'on m'avait rétorqué :
"Ah oui...tu as un uniforme bleu et le teint de ton visage aussi est bleu..."
Puis les jours de jeune femme consumés
Par la flamme bleue des amours impossibles
C'est ainsi que le bleu devint ma couleur
Qu'il devint ma tristesse
Plus tard
Lorsque viendra mon dernier jour aussi
Sans doute le ciel sera-t-il bleu
L'AUBE SUR LA VILLE DE LA MORT
La fumée bleue et la brume s'élèvent
Ici, c'est le fond des abysses
Couchés sur ces fonds abyssaux
De nombreux être humains
Partis pour un au-delà couvert d'une brume violacée
De nombreux êtres humains
Font légèrement vibrer la brume
Peut-être hésitent-ils à partir
Bleue
Profonde
L'aube de la ville de la mort
Ma vie s'est transformée en un mica bleu
Dont, finement, finement,
Les lamelles une à une se détachent de moi
Cette brume matinale givrée
Qui s'écoule vers moi prodigieusement bleue
Seraient-ce les sbires de l'au-delà qui s'approchent ?
COEXISTENCE
Les étoiles du ciel brillaient au fond du bac
D'eau de pluie
Dans laquelle nous faisions cuire le peu de nourriture que nous avions
La lumière des étoiles
Jaillissait puissamment du bain à ciel ouvert
Dans lequel je me baignais
Tendant de toutes mes forces les mains vers le ciel
J'ai entendu la voix des étoiles
" Je suis donc encore en vie !"
Les étoiles m'ont répondu en scintillant
"Oui, tu es en vie !"
Sous le ciel, dans le fond du bac
Vivait un ver
Le ver et moi étions tous deux en vie
Un petit garçon, si tôt le matin, Était-il venu chercher des insectes ? Soudain Un éclair a transpercé le petit garçon Le transformant en colonne de feu En un instant carbonisé, le petit garçon S'est écroulé sur le sol brûlant, jambes écartées, bras en croix Les yeux vides grands ouverts fixant le ciel La bouche vide grande ouverte tendue en un cri muet vers le ciel Appelait-il sa mère ? Ses frères, ses soeurs ou ses amis ? Ou bien poussait-il un cri de douleur ?