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Critique de Magieraf


La passion d'Olivia Burton pour son ancêtre hypothétique, je la comprends bien pour me passionner moi-même pour quelques ancêtres illustrement inconnus (le vrai inventeur de la Tour Eiffel, un Grand-Croix de la légion d'honneur, le sauveur du Sénat, un Robinson Crusoé ayant échoué son bateau au large de la Patagonie chilienne...). La Bd traite ainsi plus de cette passion irraisonnée pour son ancêtre, célèbre et iconoclaste, à cheval sur son arbre généalogique, le grand Richard Francis Burton, que de la vie de ce grand explorateur, même si on en voit des bribes qui permettent de retracer son parcours.

Le scénario joue sur 2 temporalités qui s'imbriquent étroitement : la quête contemporaine d'Olivia, agrégée de lettres modernes, à la recherche de son ancêtre d'un côté, dans un univers en pastel gris-marron, aseptisé, technologiquement évolué, fait d'utilités, quasi sans âme ; et de l'autre, la vie de Burton, personnage inclassable, excessif, militaire, explorateur, diplomate, espion, érudit parlant 40 langues, "fou" ("Qui vit sans folie n'est pas sage").découvreur des sources du Nil, traducteur du Kamasutra, vivant dans un monde ancien, exotique, incertain, coloré, improvisé, exubérant.

Et c'est bien le contraste qui donne du relief à l'histoire, avec en fil rouge, la complicité qui lie, tout au long de l'enquête et au delà du temps, Olivia à "Grand-Pa", symbolisée par les imixtions régulières d'un Burton coloré et souvent bouffon.

Ce que l'histoire nous dit, c'est que nous sommes tous le fruit d'une histoire familiale, que nous avons des racines et que nous sommes des héritiers. Nous nous inscrivons dans des filiations réelles ou imaginaires, avec le devoir de recevoir puis de transmettre. Nous avons un besoin quasi vital de se positionner dans ces longues lignées, ce qui nous pousse à : faire son arbre généalogique, poser des questions à ses parents ou grands-parents, fouiner dans les cartons du grenier de la maison familiale, remplis de vieilles lettres et cartes postales de nos aieux, se créer des filiations fictives et y croire, partir en Tanzanie... Je n'ose imaginer les manques des nouveaux déshérités, fruit de nos rêves prométhéens, qu'on aura coupé volontairement de leur lignée, paternelle avec la PMA ou maternelle avec la GPA.

Des scènes hilarantes : le séminaire à Trieste du fan-Club de Burton qui tourne au grotesque et qui montre en creux le besoin de tous ces gens de s'inventer, par procuration, des vies extraordinaires en proportion de l'ordinarité de leur propre existence.

Quelques très belles planches : Bombay (p58 et 59), la femme indienne (p64, 65), le désert (p82, 83), la Mecque (p88, 89), le voilier (p154 et 155).

Vers la fin, inversion des rôles et des couleurs : la professeur devient exploratrice pour retrouver les vraies sources du Nil, découvertes en 2006 par deux Néo-zélandais et un Britannique, Neil McGrigor, localisées au sud du Rwanda, dans le parc national de Nyungwe.

J'ai appris que Burton avait vécu à Tours, où j'habite, mais que le ville n'en a pas gardé trace, hélas. On peut imaginer que le climat tourangeaux a inscrit en lui, dès sa plus tendre enfance, le désir du lointain :
https://www.lanouvellerepublique.fr/tours/la-jeunesse-tourangelle-du-grand-aventurier

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