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Critique de Lililaluize


Ce livre est inspiré de faits réels.
Butler a trouvé le sujet assez intéressant pour en faire un roman, tu m'étonnes Nicko !
Il y a temps à dire sur l'individualisme du nanti richissime, tant à écrire sur la société américaine décomplexée, indécente et concupiscente.
Et j'y suis rentrée dans le Wyoming
accrochée dans le pickup avec Cole, Bart et Teddy, j'ai longé les ravins et les canyons délaissés peu de temps auparavant alors embarquée avec les Cowboys lors de la ruée vers l'or, accompagnée de Dorothy Marie Johnson, sous la colline des potences et m'y revoilà près de 70 ans plus tard, dans une Amérique toujours plus libéraliste, toujours plus capitaliste.
On troque le scalp des indiens contre celui bien plus sournois des nababs qui n'hésitent pas à dépouiller son prochain et ce à tous les étages d' une société consumériste.
L' Amérique de tous les possibles, de tous les rêves, chacun veut son lot, à commencer par l'opportunité de vivre décemment, se fixer ou s'orienter, puis surtout, à terme, se faire un tas de pognon, le leitmotiv majeur, vecteur autorisant toutes les manières d'y arriver.
Alors pourquoi pas accepter la construction de cette maison dans les nuages, dans les hauteurs des canyons, à 80 bornes de la ville, projet aussi incroyable que dément, sans doute parce que terminée à temps, le bonus est colossal pour nos trois amis.
Le présent c'est maintenant, action !
Prenons le challenge, nous, Cole, Bart et Teddy, les prolos, potes d'enfance et chefs d'une petite d'entreprise de construction de quartier, à peine connus, à peine certains de terminer ce chantier extravagant destiné en général à des entreprises calibrées avec pignon sur rue, à des hommes d'affaires aux dents longues rayant le parquet à peine posé.
4 mois de délai en plein hiver, à peine entendable (voire réalisable) et pourtant, ils s'y collent, prenant avec les exigences d'une propriétaire à laquelle on ne dit pas non et peu importe finalement les questionnements legitimes sur le pourquoi de leur embauche...
Et on les comprend, il faut dire qu'on s'y attache à ces trois là, Nickolas Butler, avec ce talent que je découvre, nous les rend proches, dresse des portraits intimistes qui font que la proximité s'installe.
Elle s'établit tellement qu'on se marre, stresse, souffre avec eux, on attend l'accident de chantier en sachant que la populace aux states n'a majoritairement pas les moyens de se payer une assurance , mais youpi, peut-être l'Obamacare sera bénéfique...
on suit la construction, un chantier soumis à un climat capricieux et déplorable à cette période de l'année et peu importe les conditions pour le ou la millionnaire, un délai et un délai, d'ailleurs, que vaut la vie d'un ouvrier ?

" c'est la nature des choses avait-il raisonné, ça se passe peut-être ainsi depuis des temps immémoriaux. À cette heure même, des hommes s'affairaient pour ériger ce palais contemporain, ce projet "phare" destiné à une personne d'une richesse inconcevable.
Des milliers d'années auparavant l'histoire était la même, sauf qu'une main d'oeuvre multipliée par plusieurs centaines avait bâti une pyramide pour un type quelconque qui se prenait pour un dieu.
Il y avait ceux qui faisaient construire et ceux qui construisaient. Tout comme il y avait ceux qui se retroussaient les manches et les autres. "

Et je les ai presque retroussées mes manches, même si mes connaissances en matière de travaux sont presqu'aussi désastreuses que ma defense criarde pour faire fuir un grizzli.
Je les ai vus se tuer à la tâche, avaler les heures jour après jour comme des forcenés, j'ai observé l'arrivée de la meth comme palliatif et carburant, assisté aux pertes de repères et à tout bon sens, perçu l'inévitable... au nom de l'argent, de l'appât du gain qui s'ancre au plus profond des exploités ne rêvant que d'évasion , de se libérer d'une vie contrariée, d'offrir une vie meilleure à une famille d'invisibles.
Ils sont si proches de cette entreprise, nos associés.
Si loin, pourtant, du monde qui leur donne la becquée, quelques miettes à l'orée d'une frontière dorée hors d'atteinte...

Un roman noir qui ne manque pas de panache. Doté d'un style acéré et d'un regard critique, Nickolas Butler met en lumière les dérives d'une partie de l'Amérique désespérée et désemparée.
Derrière le suspense qui monte en puissance, c'est un cri silencieux que l'on entend, celui de tous les imperceptibles, des oubliés , cahotés, chahutés, maltraités, dominés et opprimés.
C'est le monde du bas, celui que l'on monnaie, puisque tout s' achète, même la mort.

Un roman percutant et éloquent.
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