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Critique de bagheera


A en croire sa biographie, Sandrine Caillis prétend être un caillou découvert et adopté au gré d'un chemin, rencontre qui l'aurait, ipso facto, dotée du pouvoir de parole. Dès lors et depuis la parution du remarqué "Les ombres que nous sommes", elle nous est précieuse et on est bien contents de l'avoir trouvée.

Sachant l'exercice du second roman toujours périlleux, on ne savait pas si notre pierre précieuse allait briller de nouveau. de toute évidence, elle brille, et de mille feux. Sandrine Caillis et son Anse rouge auront réussi la fusion d'une pierre bien singulière, de celle dont on fait les bijoux et que d'aucuns nomment une pépite. Remercions au passage les Editions Thierry Magnier, toujours aussi inventives, exigeantes et à l'affut des auteurs pointus.

Venons en à l'Anse rouge et à sa forme : on retrouve l'écriture d'une esthétique rare à ce niveau en littérature jeunesse et adulte confondues. L'autrice est dotée d'une inimitable capacité à nous faire vivre les personnages de l'intérieur. le propos embrasse les situations à bras le corps, nous plonge sans complexe dans l'intimité du personnage et dans le décor. Citations, références, descriptions minutieuses, rythme, transitions, dialogues, ellipses, flash back... tout est ciselé et impeccablement mis en place dans cette construction où l'humour n'est jamais loin.

Pour ce qui est du fond : Voici les péripéties de Marie Rousseau, jeune fille issue de la classe moyenne, de ces familles qui louent des mobilhomes en été et s'en vont, panier de plage sous le bras regarder passer les bateaux en sirotant de la grenadine. En vacances à Noirmoutier avec des parents aussi tristes que conventionnels, elle va se laisser séduire et happer par des pairs issus d'une caste qui n'est pas la sienne et qu'années après années, elle retrouvera et tentera de se faire adopter
. Mais Marie a la peau fragile et transparente. Par la grâce de celle qui nous offre cette comédie, les sentiments qui traverseront notre héroïne nous traverseront aussi. Avec l'humour et le désespoir en bandoulière, malgré tous ses efforts et l'intensité de son engagement, Marie ne réussira jamais à à corriger le jeu social qui sous tend les chapitres. Chaque
elle en suffoquant avec des désirs de vengeance, des trous dans le ventre et l'impossibilité de l'oubli.

Anse rouge est un magnifique roman, de ceux qui font pleurer et rire, qui prouvent que la littérature est plus forte que la vie, de ceux qui nous racontent nos propres peines, nos refoulements, nos frustrations, nos violences subies, sans fausse pudeur et avec force. Osons le dire, on a guère fait mieux depuis Marivaux.
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