AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Cassiodorus


En 1945, Italo Calvino, qui a combattu avec les partisans dans les montagnes de Ligurie, commence un roman sur la Résistance. Il choisit de l'aborder, « pour ne pas se laisser impressionner par le sujet, de manière oblique » (Préface de 1962), et adopte le point de vue d'un enfant. D'un enfant pas comme les autres, puisque sa soeur est prostituée : il sait déjà presque tout des hommes, et, blagueur à la jolie voix, il aime les amuser et les émouvoir au café du coin. Un jour, il les trouve en train de conspirer avec un étranger. Ils lui font reproche de sa soeur, dont le principal client est un sodat allemand, et lui demandent sèchement de filer, à moins de leur apporter son pistolet. Ils n'ont dit cela que pour se débarrasser de lui, mais il les prend au mot. Seulement, quand il vient retrouver ses hommes avec le pistolet de l'Allemand, ils semblent si hésitants et il a tellement honte d'eux qu'il décide de le cacher sur les collines…
L'histoire est lancée, magnifiquement. Même si le lecteur s'interroge : ce point de vue d'enfant ne vaut sans doute que pour les premiers chapitres… ? Ce petit est trop naïf, trop obsessionnel, trop isolé de tout pour que cela tienne jusqu'à la fin !
Mais c'est justement le défi de Calvino : s'en tenir presque strictement à lui. [Il se fait donc gauler par les Allemands, interner, et rejoint un maquis un peu étrange, ramassis de bras-cassés et de loosers.] Et le petit demeure fidèle à lui-même, avec ses blagues répétitives et sa naïveté inchangée. Ce n'est pas le moment de rêver d'un roman polyphonique !
Calvino essaie de compenser en changeant de ton. [L'évasion de la prison fait penser à un roman de la bibliothèque verte d'autrefois : pour s'évader, il suffit au compagnon du petit, véritable lutin superman, de sauter depuis le haut d'une terrasse pour se retrouver en liberté, tandis que l'enfant se laisse glisser le long de la gouttière…
Plus loin, on pense à une scène affadie de Noces de sang de Pablo Neruda : tandis que le petit égrène les couplets d'une chanson mélancolique, le chef se rapproche de la femme du cuistot, la seule du camp : ils mettent ensemble des fagots dans le feu, sans faire plus attention à rien qu'à leur mains qui se rapprochent, et la grange se met à flamber…]
La bibliothèque verte, Neruda...
D'autres pages se veulent oniriques, comme le remarquait Pavese dans une des premières recensions du roman.
Mais la vérité est plutôt que tout part à vau-l'eau comme le bataillon des bras-cassés qu'a rejoint le petit… Réflexions du jeune commissaire politique, bon communiste qui espère un jour ne plus jamais dire ni penser : « peut-être ». Scènes d'amour au milieu des combats, nouvelles chansons du petit sur fond de vengeance entre hommes. Rien ne convainc vraiment, et pas non plus la tentative désespérée autant qu'artificielle de clôture du roman.
Calvino a eu beaucoup de chance de rencontrer Pavese, et que celui-ci soit allé dans sa critique au-delà de ces défauts de jeunesse !
Commenter  J’apprécie          00







{* *}