AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de michfred


"Tu es en train de me citer des crimes passionnels et il y a des gens qui ne réagissent que lorsqu'on touche à leur honneur. Et d'après moi, Peppi monaçu....
- Depuis dix ans que la moitié de la ville baise sa femme?
- Dix ans, oui. Selon toi, il faut un compteur pour l'honneur?"

Il y a tant de savoureuses répliques de cet acabit, tant de poutrônes et de niguedouilles,  tant de pique plantes et de fenottes, tant d'emboconneurs patentés  qui s'apinchent du coin de l'oeil et piapiatent dans les coins qu'on a les zygomatiques en fête en lisant ce tout premier roman du père de Montalbano, édité dix ans après sa rédaction et "pour ainsi dire inédit, car il n'eut pas de distribution" nous confie, plein d'humour, Andrea Camilleri dans la postface.

L'édition de 2005  rend enfin justice à ce coup d'essai qui ne fut pas un coup de maître éditorial,   nous permettant d'apprécier , presque 50 ans après sa rédaction, ses évidentes qualités littéraires. 

 Humour ravageur, langue  qui ne l'est pas moins - traduction brillante de Dominique Vittoz- , personnages hauts en couleur au parler savoureux, intrigue bien ficelée et Sicile sicilianissime!

Ah ce petit village , sans nul doute inspiré de Port Empédocle où sont nés Andrea Camilleri et son cher Luigi Pirandello, avec ses communistes porteurs de saints et ses  saints populistes, grands redistributeurs des biens de production , avec ses mafieux respectés, sinon respectables,  et ses flics tournés en bourrique  par une tradition tenace de vendetta et d'omerta conjuguées.

Voici donc une curiosité qui est , déjà, un petit bijou , une vraie friandise de polar !

Montalbano et Vigàta ne sont pas encore nés,  mais l'adjudant Corbo a toute la sagacité,  l'indépendance d'esprit et l'humour du futur commissaire.

Quant  au petit village sicilien sans nom des années cinquante où se déroule Le Cours des choses , il  a déjà, comme plus tard Vigàta,  ses buvanvins et ses poutrônes,  ses cafés et son église, ses bergers porteurs d'oranges,  ses fêtes patronales à San Calogero, ses assassinats commentés  - une spécialité locale!- et ses bourgeois à coite,  tellement à coite, d'ailleurs qu'ils ont beaucoup de mal à comprendre - comme le pauvre Vito, si consensuel qu'on le remarque à peine- pourquoi, soudain, on leur tire dessus...

Je me suis régalée et j'ai souvent ri aux éclats,  pas du tout gênée, au contraire, par ces mots inventés  - apax, mots-valises, mots sauvages chers à Maurice Rheims , toujours éclairés par le contexte et laissés au nuancier personnel du lecteur, pour le plus grand plaisir de son imagination!

Fin formidable, à tous les sens du mot, commentée par les Bouvard et Pecuchet locaux!

Un bijou, on vous dit, à  redécouvrir d'urgence aux éditions Fayard.
Commenter  J’apprécie          360



Ont apprécié cette critique (32)voir plus




{* *}