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Critique de Kirzy


Lorsqu'on fait connaissance de Giada, c'est une adolescente craintive, maltraitée par sa tante, coincée dans une campagne lombarde bombardée à la fin de la Deuxième guerre mondiale. Giulia Caminito raconte son parcours sur une vingtaine d'années. Mêmes points de départ et d'arrivée, mais entre temps, toute une vie en Érythrée coloniale lorsqu'à dix-sept ans elle rejoint sa mère, Ada, qui tient un café à Assab.

La Grande A est un roman d'apprentissage qui prend le lecteur dans un tourbillon. L'écriture de l'autrice est enlevée, rapide, voire heurtée, pas toujours facile à lire avec ses nombreux retours à la ligne, ses passages peu ponctués et ses dialogues sans guillemets. Il m'a fallu un peu de temps pour m'y faire mais au final, j'ai trouvé ce style très cohérent pour raconter l'urgence d'une vie à se construire, avec toute la palette d'émotions que cela induit et un lot d'événements inattendues.

C'est vraiment ce que j'ai préféré dans le roman : assister à l'éclosion d'une femme sûre d'elle et de ses choix. Et de façon générale, le roman exalte la figure féminine sous toutes ses facettes avec le duo mère-fille qui est le coeur du roman. Sans doute plus marquante que Giada, la fantasque Ada est un personnage formidable, capable de gifler un curé ou de conduire pied au plancher dans le désert africain pour transporter de l'alcool trafiqué, toujours prête à relever sa fille quand la vie l'a fait trébucher

Le roman surprend tout le temps car d'une page à l'autre, les ambiances changent radicalement, du froid hivernal lombard à la poussière du désert érythréen. Certains passages sont d'une poésie à la fois légère et mélancolique ( comme ceux consacrés à la gazelle Checco, inoubliables ), d'autres frôlent le réalisme magique au point qu'on s'attend à ce que les gazelles parlent. D'autres sont ancrés à L Histoire et raconte la colonisation érythréenne, d'abord par l'Italie fasciste, puis sous administration britannique après la chute de Mussolini, puis au pouvoir impérial du négus Hailé Sélassié, avant de rentrer en guerre d'indépendance face à cette même Éthiopie.

C'est parfois un peu long, un peu inégal d'un chapitre à l'autre. C'est souvent foutraque, en apparence seulement car on sent que l'autrice sait où elle veut aller. Mais on est emporté par la fraîche énergie de l'écriture et on reste attaché à ces personnages de conte moderne, touché par ces vies entre rêves, espoirs, désillusions, portées par une endurance résiliente car collective.

La Grande A est le premier roman de Giulia Caminito. On y sent toutes les promesses d'une écrivaine qui entend marquer d'emblée son style et présenter l'originalité de son univers. Un Jour viendra a été un énorme coup de coeur, son deuxième roman - mais premier traduit en France.
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