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Citations sur Le maître dans la diffusion et la transmission du boudd.. (143)

Le terme peut évoquer une condition passive, vulnérable, une condition de dépendance. Ces conditions, présentes chez plusieurs adeptes rencontrés, peuvent aboutir à des « utilisations », conscientes ou non, de la part de leur(s) maître(s). Il faut tout de même employer certaines précautions afin d'éviter tout amalgame : toutes les activités relevant d'une abnégation de soi, d'une dévotion et d'un respect pour les maîtres, ne peuvent être comparées et définies comme étant des « utilisations ». L'ambiguïté de certaines activités, qui, vécues par le disciple comme le samaya peut-il, eu égard à son importance formelle, devenir l'instrument d'un pouvoir coercitif ? Le lien du samaya, disait Lama Guendune, n'est pas formalisé ni ritualisé, c'est un engagement, une corde qui relie maître et disciple. Les samaya pris lors des grandes initiations publiques n'ont pas grand-chose à voir avec les samaya pris dans l'intimité d'une relation de maître à disciple. L. Deshayes souligne que les samaya, outre leur caractère formel « ont une dimension intime, dite “secrète”, qui est la plus importante ». Cette dimension est normalement connue du seul disciple et son maître. Cependant, plusieurs fidèles m'ont parlé de leurs samaya, de manière explicite ou non. Dans leurs discours, le samaya a pu entraîner de forts sentiments de culpabilité car, considéré comme vital dans la relation au maître, les entorses à ses vœux constituent des fautes graves. La lecture des textes traditionnels concernant ses vœux et leur respect tend à influer l'interprétation personnelle des disciples, qui n'ont pas forcément connaissance du type de samaya qu'ils sont censés détenir. Par exemple, lorsqu'on lit : « Celui qui, après s'être engagé dans l'esprit d'éveil et ses vœux les brise ne peut échapper aux renaissances inférieures ». Ce type de phrase influence plusieurs fidèles. Il peut amener à des comportements perturbateurs et coupables chez le disciple. Lorsque ces paroles sont prononcées par leur maître (avec des variantes), l'effet peut être plus pernicieux, suivant l'équilibre psychologique de la personne et la motivation du maître qui les prononce. Parfois, dans un sangha donné, ce n'est pas dans les relations de maîtres à disciples que des abus éclatent mais entre les pairs (frères et sœurs Vajra) ou avec d'autres maîtres. Par exemple, un adepte en critique un autre car ce dernier n'a pas respecté l'éthique des vœux sans en parler à son lama et qu'il a endommagé son samaya, ce qui est préjudiciable. Parfois, c'est un membre du sangha qui va témoigner au lama des agissements d'un autre disciple, agissements qu'il juge non conforme à ses engagements. Des contraintes nées de la vie communautaire et du rapport à la hiérarchie engendrent plusieurs processus de contrôle interne, de régulation et de codification des pratiques et des comportements.
p. 417
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En effet, il apparaît que des procédés de suggestion sont utilisés par certains maîtres afin d'obtenir certaines faveurs, matérielles ou autres. L'efficacité du pouvoir symbolique du langage par exemple, nécessite « la croyance dans la légitimité des mots et de celui qui le prononce, croyance qu'il n'appartient pas aux mots de produire ». Bourdieu soulignait que le pouvoir symbolique ne se suffit pas à lui-même, il trouve son fondement dans les rapports généraux de domination, dont il peut apparaître comme une « sublimation ». L'idéalisation, les projections, l'attachement et la dépendance sont autant de sentiments qui peuvent générer des abus chez les guides à qui on voue une « confiance aveugle ». Le terme suggestion proviendrait, selon G. Fiorentini « de l'étymon latin subgerere, verbe qui signifie bien “mettre (ou poser) quelque chose sous (ou plus bas)” », mais qui contient en même temps l'acception positive de communiquer, enseigner, conseiller et aussi l'acception négative d'insinuer, chuchoter quelque chose à l'oreille de quelqu'un ou même d'induction de forces surnaturelles ».
p. 414
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Ce témoignage critique, à la fois envers certains maîtres tibétains et occidentaux mais aussi envers de nombreux fidèles, est révélateur de plusieurs témoignages recueillis par des bouddhistes de longue date, qui aujourd'hui critiquent sévèrement certains développements du Vajrayana en France (plus largement au niveau mondial). Du côté des maîtres, les comportements sont évidemment variables et ne répondent pas à des caricatures rigides comme Georges a pu en réaliser.
Dans sa thèse, A. Frechette mentionne que certains maîtres considèrent uniquement leurs étudiants occidentaux comme leurs servants (gyog-po) alors que d'autres les considèrent comme des étudiants. Le modèle de la relation au maître telle qu'elle s'exprime dans la tradition tibétaine est marqué culturellement et sa transposition en Occident donne des situations inédites d'incompréhensions et de projections réciproques. Dans le pire des cas, des abus de toutes sortes viennent se greffer à ces relations, où les femmes, majoritairement les plus proches du maître (servantes), peuvent être prises comme partenaires sexuels.
L'argent est incontestablement un enjeu majeur qui génère lui aussi des abus. S. Wetzel mentionne que c'est un véritable problème en Occident que les maîtres reçoivent de l'argent de leurs disciples. Elle prône un travail séculier à côté de l'activité de maître32. La capacité du disciple à être généreux, à ne plus se soucier de son ego, à se donner littéralement, est perçue comme une qualité, en outre génératrice de mérites. On peut comprendre que ce don de soi puisse être instrumentalisé et exploité à des fins nettement plus triviales que le cheminement sur la voie de la Libération.
p. 413
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Georges (56 ans), pratiquant Kagyü depuis 29 ans, me témoigne de sa perplexité face à l'accroissement de « maîtres bidons qu'on nomme Rinpoché un tel, Sa Sainteté bidule, lama machin... ». Son témoignage est intéressant à plus d'un titre car il soulève des questions relatives à la légitimité des maîtres et à la responsabilité directe des disciples. Pour lui, les maîtres authentiques se font rares et les fidèles devraient davantage « faire attention » avant de s'en remettre à l'un d'eux. Il m'explique que la position d'autorité d'un maître qu'on pense être éveillé entraîne des comportements parfois surprenants de la part des disciples « complètement béats devant leur lama, qui ne demandent qu'à obéir ». Il ajoute que cette position et cette situation peuvent entraîner de la part du maître des pensées et des actions qui ne sont pas toujours honorables à l'égard des disciples. C'est un processus classique pour Georges, que l'on retrouve partout : « C'est la nature humaine et sans preuve du contraire, les maîtres, même si tu dois les considérer comme des bouddhas sont toujours des hommes, c'est ce que les gens semblent oublier. Les gens sont tellement paumés, en recherche de je ne sais quel sauveur que voilà où on en est ». Il s'interroge alors devant l'inhibition de l'esprit critique d'une bonne partie de fidèles devant ce qu'il nomme « la profusion de pseudos maîtres qui n'en veulent qu'à notre fric ». Il me dit alors d'aller en Inde afin de voir dans quelles « misérables conditions vivent certains lamas avec leurs 4X4 de luxe garés devant leurs monastères gigantesques » cela, avec un sourire ironique. II témoigne alors de son expérience avec son maître tibétain aujourd'hui décédé, en vantant les qualités. Il poursuit en témoignant de la « cupidité » et de la « luxure » de « Tibétains malins, surtout ceux qui ont compris qu'il y avait du fric à se faire en Occident et ailleurs ». Il trouve néanmoins cela « normal » : « Pourquoi seraient-ils différents des Occidentaux, de leur soif de pouvoir, d'argent et de conquête ? En plus. ils le font d'une manière assez habile, subtile comme on dit ». S'en suit alors une comparaison avec les missionnaires chrétiens en Asie qui usaient de tous les stratagèmes possibles pour convertir les bouddhistes et les lamas tibétains en France :
« Ici, c'est l'inverse, on se presse et on paye pour recevoir la bénédiction d'un lama que l'on ne connaît même pas ! C'est comique ! Les gens pensent qu'ils accèdent aux enseignements tantriques alors qu'on leur sert ni plus ni moins qu'un catéchisme, une grande messe. Ils y croient, c'est ça l'essentiel non ? Quelle est la différence entre un lama tibétain opportuniste mais qui sait de quoi il parle quand il parle du dharma, comme un professeur, et un petit lama français ignare comme il y en a pas mal, qui souvent cache sa merde mentale derrière sa robe bordeaux ? Je préfère encore le tibétain, qu'il ne faut pas prendre comme un lama au sens littéral du terme mais comme un prof qui n'a donc pas de compte à rendre de sa vie privée et de ses intentions. Seulement c'est un lama quand même avec tout ce que cela suppose de projections et puis, il n'a pas envie de perdre son titre non plus et de se dire professeur. Et le lama français ignare, c'est quoi son problème ? C'est un impuissant tout simplement qui se planque derrière son titre et sa robe car il est incapable de faire autre chose, et franchement, faut voir les dégâts que ce genre de types fait. Mais si les gens sont assez cons pour aller les trouver, pourquoi pas ? » (Paris, 2005)
p. 412
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II. UNE RELATION A DOUBLE TRANCHANT
1. Disciples ou servants ?
« Pauvres gens misérables, peuples insensés, nations opiniâtres à votre mal et aveugles à votre bien ! Vous vous laissez enlever sous vos yeux le plus beau et le plus clair de votre revenu, vous laissez piller vos champs, voler et dépouiller vos maisons des vieux meubles de vos ancêtres ! Vous vivez de telle sorte que rien n'est plus à vous. Il semble que vous regarderiez désormais comme un grand bonheur qu'on vous laissât seulement la moitié de vos biens, de vos familles, de vos vies. Et tous ces dégâts, ces malheurs, cette ruine, ne vous viennent pas des ennemis, mais certes bien de l'ennemi, de celui-là même que vous avez fait ce qu'il est, de celui pour qui vous allez si courageusement à la guerre, et pour la grandeur duquel vous ne refusez pas de vous offrir vous-mêmes à la mort. Ce maître n'a pourtant que deux yeux, deux mains, un corps, et rien de plus que n'a le dernier des habitants du nombre infini de nos villes. Ce qu'il a de plus, ce sont les moyens que vous lui fournissez pour vous détruire. D'où tire-t-il tous ces yeux qui vous épient, si ce n'est de vous ? Comment a-t-il tant de mains pour vous frapper, s'il ne vous les emprunte ? Les pieds dont il foule vos cités ne sont-ils pas aussi les vôtres ? A-t-il pouvoir sur vous, qui ne soit de vous-mêmes ? Comment oserait-il vous assaillir, s'il n'était d'intelligence avec vous ? Quel mal pourrait-il vous faire, si vous n'étiez les receleurs du larron qui vous pille, les complices du meurtrier qui vous tue et les traîtres de .vous-mêmes ? (...) Vous vous affaiblissez afin qu'il soit plus fort, et qu'il vous tienne plus rudement la bride plus courte. Et de tant d'indignités que les bêtes elles-mêmes ne supporteraient pas si elles les sentaient, vous pourriez vous délivrer si vous essayiez, même pas de vous délivrer, seulement de le vouloir »*.
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* Le discours de la servitude volontaire...op.cit.
p. 411
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Mais, dans plusieurs communautés bouddhistes d'Occident, il relève la présence de la détention d'une vérité particulière avant toute investigation. L'on se retrouve alors devant une « double pensée » (« double-think ») ; d'un côté, on doit tout tester avant de l'adopter et en même temps, ce que dit le lama doit être cru car il se réfère à un plan de réalité au-delà de notre compréhension. Les conséquences, selon P. Bishop, peuvent aller du mythe de l'infaillibilité et de l'omnipotence au paternalisme. Les critiques envers le maître sont perçues comme étant le reflet de l'ego et les fidèles s'abstiennent en général de critiquer ouvertement leur lama ». La résultante est une inhibition souvent excessive de l'esprit critique, pouvant amener à des abus de toutes sortes. Dans les centres communautaires, l'assimilation des différents niveaux hiérarchiques engendre un discours normatif et orthodoxe chez les fidèles qui concourent à adopter le point de vue dominant, justifiant ainsi leur domination (réelle ou symbolique). Ils adoptent la place dans la structure de la communauté que l'on veut bien leur laisser. Foucault rappelait à juste titre qu'« il faut en somme admettre que ce pouvoir s'exerce plus qu'il ne possède, qu'il n'est pas le « privilège » acquis ou conservé de la classe dominante, mais l'effet d'ensemble de ses positions stratégiques - effet que manifeste et parfois reconduit la position de ceux qui sont dominés ».
Pour revenir à la place qu'occupe ou que prend le lama, V. Saroglou mentionne les témoignages sur le danger de se prendre pour le Père. Le fait qu'un père spirituel conseille de chercher un maître infaillible peut en effet laisser supposer « que le père perçu par le disciple comme infaillible risque de se prendre comme tel »24, raisonnement pertinent pour plusieurs maîtres rencontrés, même s'il en existe évidemment des plus humbles.
p. 410
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2.1 Le maître infaillible et intouchable
P. Bishop rappelle : « it is emphasized that to criticize a lama, or a teachings, lineage and system is a grave fault. Indeed in old Tibet is was also a great sin and a crime ». Une fois que le lama a été choisi comme tel par le disciple, ce dernier ne doit pas, a priori, le critiquer. En pratique, cette injonction fondamentale est plutôt respectée mais pas systématiquement. Les critiques, mais même les désaccords que l'on peut avoir avec le maître sont d'ailleurs perçus comme des visions erronées et des manifestations de l'orgueil du sujet, donc de son ego. D'une manière générale, les maîtres enseignent que le mal est une projection de notre esprit et qu'il se trouve en nous et non à l'extérieur. Si une personne n'est pas d'accord avec le maître et le lui fait part, ce dernier lui montrera, avec des procédés rhétoriques variables, que c'est sa vision étriquée du monde et des phénomènes qui le poussent à envisager les choses ainsi et qu'il doit essayer de se libérer de ses conditionnements mentaux qui l'enferment dans un système de pensée particulier. Il faut se remettre à l'esprit que le maître que l'on a pris comme tel est considéré comme ayant les qualités requises et inhérentes à un maître authentique. Ce maître est donc considéré par ses disciples comme libre de conditionnements, qui, même s'il n'est pas totalement libéré, est capable de mener son disciple sur le chemin de la Libération. Il semble que de nombreux fidèles ne soient pas très réceptifs à l'idée des différents niveaux de lamas ; le leur est forcément vu et perçu comme l'égal d'un Bouddha. Lorsque P. Bishop écrit que les Rinpoché sont considérés comme détenant la « vérité absolue », on peut élargir le propos aux lamas et non aux seuls Rinpoché. Il relève un paradoxe particulièrement éclairant et représentatif des observations que j'ai pu réaliser. En effet, il note que les livres et plus largement la tradition bouddhique, prône l'injonction de tester le maître et l'enseignement et de ne pas tout adopter aveuglément.
p. 409
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Le Gyalwang Drukpa, hiérarque Drukpa-Kagyü, dénonce les maîtres qui « donnent de mauvais conseils et enseignent avec une volonté de manipulation afin de s'assurer une réputation lucrative. Ils programment de grandes initiations, proposent des activités alléchantes et font beaucoup de publicité afin d'obtenir de l'argent, d'être célèbres, d'acquérir du pouvoir. Tout cela est très superficiel et très négatif ». Il poursuit :
« Les pires sont ceux qui cherchent à manipuler, ils vous détruisent et vous privent de toute votre énergie simplement par amour-propre. Les Européens ont vraiment besoin de maîtres authentiques. Bien sûr, il y en a beaucoup. Malheureusement, des Occidentaux, mais aussi des Orientaux, je ne sais pas pourquoi, se sont engagés dans une mauvaise direction. Montrer un mauvais chemin incite beaucoup de gens à s'y engager. C'est un comportement que je ne comprends pas et c'est vraiment dommage. Peut-être est-ce le signe de notre époque sombre. On peut le vérifier aux USA. Montrer le chemin authentique n'attire personne mais se mettre en valeur ou exagérer un peu, essayer de manipuler, font se précipiter les foules.
Les pratiquants ont donc aussi une responsabilité ?
La responsabilité est de 50/50. »
Selon lui, la responsabilité est donc partagée. Dans ce chapitre, nous évoquons des expériences parfois singulières, c'est-à-dire qu'elles ne sont en aucun cas généralisables bien qu'elles reflètent des comportements, actions et pensées, qui ne sont pas encore pris en compte dans le traitement du bouddhisme tibétain en France et qui n'ont pas été évoquées dans les recherches universitaires françaises ultérieures.
p. 406
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Les abus de pouvoir, notamment sexuels (mais aussi financiers) perpétrés par certains maîtres ont secoué la communauté bouddhiste américaine et ont entraîné des remis en cause et des questionnements sur l'autorité du maître, en témoigne la conférence des enseignants bouddhistes occidentaux à Dharamsala qui date de 1993 avec le Dalaï-Lama*. Ce dernier met souvent en garde les gens et leur demande de la prudence avant de choisir un maître. Suite à cette conférence, une « lettre ouverte à la communauté bouddhiste » fut transmise et diffusée sur Internet, signée par des enseignants présents à la conférence, dont un seul lama français. Parmi les points résolutions adoptées, le cinquième concerne directement les relations maîtres/ disciples :
« Il a été exprimé un souci tout particulier pour les comportements contraires à l'éthique parmi les enseignants. Ces dernières années, des enseignants autant orientaux qu'occidentaux ont été impliqués dans des scandales sexuels, d'abus d'alcool et de drogues, de détournements de fonds et d'abus de pouvoir. Il en est résulté un tort considérable, non seulement pour la communauté bouddhique mais aussi pour les individus en cause. Chaque élève doit être encouragé à prendre des mesures responsables pour confronter l'enseignant avec les aspects de son comportement qui contreviennent à l'éthique. Si ce dernier ne montre aucun signe de réforme, les étudiants ne devraient pas hésiter à rendre public tout comportement contraire à l'éthique dont il existe une preuve irréfutable. Ceci devrait être fait sans égard aux autres aspects bénéfiques du travail de l'enseignant et du dévouement spirituel qu'on peut ressentir pour lui ou elle. Il devrait être très clair dans toute publicité qu'un tel comportement n'est pas conforme aux enseignements bouddhiques. Peu importe le niveau d'éveil qu'aurait atteint un enseignant ou qu'il prétendrait avoir atteint, personne ne peut se situer au-dessus de la norme de la conduite éthique. Afin de ne pas entacher la réputation du Bouddhadharma et d'éviter de faire du mal aux élèves autant qu'aux enseignants, il faut que tous les enseignants vivent au moins selon les cinq préceptes laïcs. Dans les cas où les normes éthiques auraient été transgressées, il conviendrait de faire preuve de compassion et de bonté autant envers l'enseignant qu'envers l'étudiant. »
Il semble que cette lettre ouverte n'ait pas eu d'échos dans les centres bouddhistes français. J. Snelling, lui-même bouddhiste de longue date, témoignait du danger et de la vulnérabilité des maîtres, ces derniers jouissant de pouvoir, de prestige et de renommée, et étant par là même « sensibles à la corruption ». Le « risque de l'inflation égotique (difficile de garder la tête sur les épaules quand des dizaines de personnes vous regardent à longueur de journée avec une admiration ébahie) » était pour lui un réel problème.
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*« Conférence d'enseignants occidentaux du bouddhisme », Actualités tibétaines, n°6, 2e trimestre 1997, p. 23-33. Questions autour du rôle de l'enseignant, la transmission, la pratique, l'éthique des enseignants, l'authenticité, l'adaptation, la psychologie et le dharma, les femmes et le dharma, le sectarisme, le monachisme, etc.
p. 405
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Le maître que les textes et les discours des maîtres disent de suivre est un maître qui est totalement imprégné de l'« esprit d'éveil ». Dans le cas contraire, le disciple est encouragé à ne pas suivre un tel maître. La rencontre et le choix d'un maître sont souvent expliqués par le fruit du karma et des pensées. Les disciples seraient donc plus ou moins prédestinés à rencontrer et respecter tel type de maître plutôt qu'un autre. Cependant, quelle que soit l'école tibétaine, les disciples rencontrés considéraient tous leur maître comme authentique (qu'il s'agisse d'un lama tibétain ou d'un occidental).
F. Midal écrit : « Au nom du respect qui serait dû au maître, de l'importance de la dévotion dans le Bouddhisme du Vajrayana, l'incompétence de tant de dignitaires n'est pas reconnue ; elle est encouragée. Une sorte de conspiration du silence règne souvent en ce domaine. Personne n'ose rien dire ». En tant que bouddhiste de longue date et enseignant bouddhiste, il a pu rencontrer des hommes et femmes « abusés moralement ». Pour lui, il est grand temps de dénoncer ces formes de « manipulation » et d'« incompétences ». Il encourage à une certaine prudence face aux maîtres qui ne sont préoccupés que du développement de leur communauté, monastères, pouvoir et renommée. Pour une majorité de fidèles avec qui j'ai pu m'entretenir sur ces aspects, les abus (de pouvoir, d'autorité) incombent à la responsabilité des autorités, des maîtres. Pour une minorité, ce n'est pas tant les maîtres qui sont responsables mais les personnes qui se mettent au service de tels maîtres inauthentiques et qui s'inscrivent en porte à faux avec la tradition (qui recommande de bien choisir son maître, d'être sûr de ses qualités avant de le prendre comme tel). Chez ces derniers, c'est la responsabilité individuelle qui prime.
p. 404
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