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Critique de oiseaulire


Les nouvelles contenues dans le recueil "Musique pour caméléons" ont été éditées en 1980.

Tuman Capote est à la fin de sa vie, et dans sa préface il fait le point sur l'évolution de son écriture tout au long de sa carrière d'écrivain.

Il nous dit comment il a remanié certaines de ses oeuvres, nous confie l'erreur qu'il a (peut-être) commise en effaçant le narrateur de certaines d'entre elles, qu'elles soient de fiction ou fondées sur des faits divers ("De sang-froid").

Car à relire ses anciens livres, on trouve toujours qu'on aurait pu les écrire mieux, du moins si on est un perfectionniste comme lui.

Personnellement, je ne trouve rien à critiquer dans l'oeuvre de Capote, qu'elle soit volontairement poétique, comme "La harpe d'herbes" ou minimaliste. Car derrière les variations de son style demeure sa façon unique d'appréhender le monde, faite de lucidité, de sobriété, de vacherie et de bienveillance (cela peut sembler contradictoire, et pourtant...)

Y a-t-il une réelle différence entre ses premiers écrits et les autres ? Ses ré-écritures de faits réels, tels "De sang-froid", "Cercueils sur mesure", ou son récit d'une conversation avec Marilyn Monroe, nous conduisent-ils vraiment dans un monde éloigné de celui de ses oeuvres imaginaires telles "Petit Déjeuner chez Tiffany" ou "Musique pour caméléon" ?

Dès notre première perception nous réécrivons le réel, à tel point qu'aucun d'entre nous ne voit le même. Alors que dire quand un puriste comme Capote le travaille pour produire cette épure qui nous percute directement le cerveau et nous persuade de sa vérité ? Qui n'a pas rencontré une femme qui nous fait croire en ses dons magiques ? Ou subi à son corps défendant les confidences gênantes d'un vieil ami ? Qui ne s'est senti à la longue influencé par l'idée fixe d'un camarade ou n'a tenté de soutirer ses affaires de coeur à un proche ?

Et même si nous n'avons rien vécu de tout cela, tout nous convainc chez Capote. Comment parvient-il à nous piéger en usant d'une telle sobriété ? C'est bien là que réside la magie de l'art.

Comme dans la vraie vie, on n'assiste presque jamais à la fin de l'histoire : on ne saura pas si le soupçon était justifié, si notre camarade de classe est devenu ou non un pédophile, si la voyante cupide avait un vrai don... ni si Dieu existe. Et c'est cette insatisfaction que l'auteur a su transformer en art de dire la vie en y introduisant plus que la vie : l'attention, le souffle, la proximité avec elle que nous n'avons pas toujours lorsque nous la traversons à tâtons.
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