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Critique de Enderlion


A l'image des chants du jeune Ansset, son personnage principal, Les Maîtres Chanteurs est un livre puissant. Puissant mais épuisant. On ne ressort pas entièrement indemne d'une telle lecture. Plutôt lessivé, dans tous les sens du terme ; et un peu grandit, peut-être. Pour ma part, ce livre a été un ascenseur émotionnel. Je l'ai, tour à tour, aimé puis détesté, au point même de le rejeter, pour finalement réinterpréter tout ce que je lisais, en reconnaître la véritable valeur et apprécier le roman pour ce qu'il était : un conte initiatique au cheminement dur, douloureux, davantage recouvert d'épines que de miel ; en somme une tragédie cosmique. Ah, je n'y vais pas avec le dos de la cuillère ! Mais il est une chose que l'on doit reconnaître, c'est qu'il s'agit là d'un livre plein d'amour.

Orson Scott Card, son auteur, nous conte l'histoire d'un enfant nommé Ansset dont la voix fait des merveilles. Recueilli très jeune - peu après son enlèvement - par les maîtres chanteurs de la manécanterie dont le palais du chant fait la fierté de la planète Tew, il se destine à devenir un Oiseau Chanteur pour l'empereur de la galaxie, le redoutable Mikal. L'enfant va dès lors mener une existence hors du commun, découvrant l'affection d'un père adoptif mais aussi et surtout la méchanceté enchâssée dans le coeur des hommes. Il connaitra un destin des plus incroyables et finira par devenir une légende. Mais pour dépasser le cadre du simple mythe, il lui faudra faire un ultime sacrifice...

Comme je l'ai dit, le livre a été plus ou moins difficile à appréhender et je me dis qu'il sera d'autant plus difficile à critiquer. Pour cette raison je ne m'étendrai ni en éloge ni en reproche. Je synthétiserai mon ressenti au maximum. Si ce n'est pas déjà fait...

Autant j'ai apprécié la première partie Esste, puis la deuxième Mikal (quoi que j'aurais à redire), autant j'ai presque détesté la troisième. La faute à ce personnage insupportable qu'est Josif, lui et sa conception de l'amour jetable. Si jusqu'ici l'ambiguïté qui traînait dans le sillage du récit ne me gênait guère, dès le moment où les intentions de l'auteur sont devenues nettement perceptibles, j'ai vite déchanté. Tout a commencé avec ce passage où Josif reluque littéralement le jeune Ansset alors âgé de seulement 12 - 13 ans et se met à fantasmer. Et là, je crache ma pillule, on se retrouve en pleine pédophilie. Alors je vais bien peser chacun de mes mots, prendre toutes les précautions oratoires nécessaires - ou plutôt ici, écrites - étant donné l'époque insensée dans laquelle nous vivons, une période d'inquisition bis où exprimer ce que l'on ressent devient de plus en plus compliqué, pour ne pas dire impossible.

Si j'ai personnellement détesté cette partie du livre et le personnage de Josif, ce n'est en rien dû à l'orientation sexuelle de ce dernier. Un coeur est libre d'aimer comme il entend aimer, les fesses étant la propriété de celui qui les porte (vous noterez au passage comment la seconde partie de ma phrase enfonce la première). Ici, ce que je réprouve c'est juste la façon dont OSC a traité le texte, j'ai failli dire le sexe. Alors oui, je sais qu'il est mormon et blablabla, mais où diable voulait-il en venir ? Visait-il le plaidoyer ou la diatribe ? La réponse ne tarde pas à venir quand on découvre la souffrance de Ansset après qu'il ait aimé Josif et la barbarie dont est victime Josif lui-même qui, pour le coup, regagne mon estime tant il fait pitié. de toute évidence, Orson Scott Card - au demeurant un auteur que j'apprécie - semble vouloir nous donner une petite leçon : l'homosexualité, c'est pas bien. Alors, je ne sais pas si c'est moi qui ai mal compris, si en détestant Josif je suis tombé dans le panneau - et cela, je ne le crois pas, n'étant pas homophobe - mais je me demande encore, en dépit d'une quatrième partie qui relance le récit et d'une cinquième, magnifique, frôlant l'apothéose, quelle est l'intérêt de toute cette histoire qui n'a au final ni queue ni tête. C'était quoi le but ? Les personnages en prennent tellement plein la gueule que c'est limite du masochisme. Bref, avec le recul, je me dis que Orson Scott Card est un auteur difficile à lire, non pas dans la forme et dans le fond mais dans l'approche et dans ses intentions. Avec le recul toujours, je me dis que des livres comme La Stratégie Ender (avec son pacte de Varsovie de mes deux... dans le futur !) ou encore l'interminable Xénocide (et ses dérives psychotiques) sont touchés par les mêmes défauts, les mêmes lourdeurs, au point d'en devenir harrassant pour le lecteur.

Je n'en dirai pas plus, je crois que mon ressenti est clair. Si objectivement, le livre mérite 4 étoiles ; subjectivement, il n'en mérite pas plus de trois. Et une chose est sûre, ce n'est pas demain la veille que je me lance à nouveau dans un roman de Orson Scott Card. Je vais laisser passer du temps et panser mes plaies avec ce bon vieux Jack Vance qui, lui au moins, me vide la tête pour mieux m'emmener en balade à travers les étoiles...

Pour clore cette critique sur une note plus positive, j'inviterai les lecteurs à découvrir une bande dessinée à laquelle je n'ai cessé de penser lors de ma lecture du livre. Il s'agit d'une série en six tomes tout simplement magnifique intitulée le Lama blanc. Issu de l'imagination débridée du grand manitou Alejandro Jodorowski, l'histoire nous conte là aussi le destin extraordinaire d'un enfant. Et s'il n'est pas question de chant, on n'y parle tout de même d'amour et de souffrance, l'un n'allant pas sans l'autre.

Et par les (désastreux) temps qui courent, l'amour, c'est la seule douceur qui nous reste... avec le chocolat, cela va de soi.
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