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Citations sur Limonov (221)

Ces façons viriles, s'il était de bonne foi, devraient épater Edouard. Au lieu de quoi il écrit, comme Anna Politkovskaia, des pamphlets expliquant que Poutine est non seulement un tyran, mais un tyran falot et médiocre, à qui est échu un habit trop large pour lui. La fausseté de cette opinion me semble criante. Je pense que Poutine est un homme d'État de grande envergure et que sa popularité ne tient pas seulement à ce que les gens sont décervelés par des médias aux ordres. Il y a autre chose. Poutine répète sur tous les tons quelque chose que les Russes ont absolument besoin d'entendre et qui peut se résumer ainsi : "On n'a pas le droit de dire à 150 millions de personnes que soixante-dix ans de leur vie, de la vie de leurs parents et de leurs grands-parents, que ce à quoi ils ont cru, ce pour quoi ils se sont battus et sacrifiés, l'air même qu'ils respiraient, tout cela était de la merde. Le communisme a fait des choses affreuses, d'accord, mais ce n'était pas la même chose que le nazisme. Cette équivalence que les intellectuels occidentaux présentent désormais comme allant de soi est une ignominie. Le communisme était quelque chose de grand, d'héroïque, de beau, quelque chose qui avait confiance et qui donnait confiance en l'homme. Il y avait en lui de l'innocence et, dans le monde sans merci qui lui a succédé, chacun confusément l'associe à son enfance et à ce qui fait pleurer quand vous reviennent des bouffées d'enfance."
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Autrefois, on vivait mal, on râlait dans sa barbe, il n’empêche qu’on était globalement fiers : de Gagarine, du spoutnik, de la puissance de l’armée, de l’étendue de l’Empire, d’une société plus juste qu’en Occident. La liberté d’expression débridée de la glasnost a abouti selon Édouard à enfoncer dans le crâne de gens simples et sans malice comme son interlocuteur, d’abord que tous ceux qui ont gouverné le pays depuis 1917 étaient des sadiques et des assassins, ensuite qu’ils l’ont conduit à la déroute. « La vérité, se lamente ce type, c’est qu’on est un pays du tiers-monde : la Haute-Volta avec des missiles nucléaires. »
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« Boris Nicolaïevitch, la démocratie, c’est bien, mais sans élections, c’est plus sûr. »
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Il comprend une chose essentielle, c’est qu’il y a deux espèces de gens : ceux qu’on peut battre et ceux qu’on ne peut pas battre, et ceux qu’on ne peut pas battre, ce n’est pas qu’ils sont plus forts ou mieux entraînés, mais qu’ils sont prêts à tuer. C’est cela, le secret, le seul, et le gentil petit Édouard décide de passer dans le second camp : il sera un homme qu’on ne frappe pas parce qu’on sait qu’il peut tuer.
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Que la police ou l’armée soient corrompues, c’est dans l’ordre des choses. Que la vie humaine ait si peu de prix, c’est dans la tradition russe. Mais l’arrogance et la brutalité des représentants du pouvoir quand de simples citoyens se risquaient à leur demander des comptes, la certitude qu’ils avaient de leur impunité, voilà ce que ne supportaient ni les mères des soldats, ni celles des enfants massacrés à l’école de Beslan, au Caucase, ni les proches des victimes du théâtre de la Doubrovka.
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Une Volga noire glisse le long du trottoir enneigé. Le maître en descend, les cheveux blancs lissés en arrière, emmitouflé dans une élégante pelisse, fumant dans une pipe anglaise du tabac aromatique. Même sa légère boiterie est distinguée.
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la rêverie, c'est l'exact contraire de la méditation. Petit bruit de fond mental dont la plupart des gens n'ont même pas conscience alors que c'est la pire des pertes de temps et d'énergie.
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L'atmosphère au 'Rousskoié Diélo' est douce, poussiéreuse, très russe. Café le matin, thé avec beaucoup de sucre toutes les heures et, presque un jour sur deux, un anniversaire justifiant qu'on sorte les cornichons marinés, la vodka et le cognac Napoléon pour les linotypistes dont c'est le grand snobisme. (...) C'est en somme un endroit chaleureux, rassurant pour quelqu'un qui vient de débarquer et ne parle pas anglais, mais c'est aussi un mouroir où ont échoué les espérances de gens qui ont dû arriver en Amérique en croyant qu'une vie nouvelle les attendait et se sont englués dans cette tiédeur douillette, ces infimes querelles, ces nostalgies et ces vains espoirs de retour. Leur bête noire à tous, plus encore que les bolcheviks, c'est Nabokov. Non parce que 'Lolita' les choque (enfin si, un peu), mais parce qu'il a cessé d'écrire des romans d'émigré pour émigrés, tourné son large dos à leur petit monde rance. Édouard, par haine de classe et mépris de la littérature pour littérateurs, n'aime pas Nabokov davantage qu'eux, mais il ne voudrait pour rien au monde le détester pour les mêmes raisons qu'eux, ni s'attarder entre ces murs qui sentent la tombe et le pipi de chat.
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Politiquement, je penchais nettement à droite. Si on m'avait demandé pourquoi, j'aurais répondu, je suppose, par dandysme, goût d'être minoritaire, refus du panurgisme. On m'aurait étonné en me disant que, lecteur de Marcel Aymé et pourfendeur de ce qu'on n'appelait pas encore le « politiquement correct », je reproduisais les opinions de ma famille avec une docilité qui aurait pu servir d'exemple pour illustrer les thèses de Pierre Bourdieu.
Cela m'ennuie de parler avec aussi peu d'indulgence de l'adolescent et du très jeune homme que j'ai été. Je voudrais l'aimer, me réconcilier avec lui, et je n'y arrive pas. Il me semble que j'étais terrorisé : par la vie, par les autres, par moi-même, et que la seule façon d'empêcher que la terreur me paralyse tout à fait, c'était d'adopter cette position de repli ironique et blasé, de considérer toute espèce d'enthousiasme ou d'engagement avec le ricanement du type pas dupe, revenu de tout sans être jamais allé nulle part.
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La première fois qu'Édouard est venu [aux réunions du comité de rédaction de 'L'Idiot international'], il y avait Patrick Besson, Marc-Édouard Nabe, Philippe Sollers, Jacques Vergès. On attendait Le Pen, finalement c'est le syndicaliste Henri Krasucki qui est venu, et Sollers s'est mis au piano pour chanter 'L'Internationale'. (...)
Édouard est revenu d'autant plus régulièrement qu'il habitait juste à côté, quelquefois il amenait Natacha avec lui, et plus il venait, plus il se sentait à l'aise. Extrême droite et extrême gauche se soûlaient coude à coude, les opinions les plus contradictoires étaient encouragées à se côtoyer sans qu'il soit question de déboucher sur quelque chose d'aussi vulgaire qu'un débat. On échangeait des tuyaux sur la meilleure façon de se faire payer par Jean-Édern (« Tu lui donnes l'article d'une main, tu prends les billets de l'autre » : technique Sollers), on se battait avec lui, se brouillait, se raccommodait, on décrochait son téléphone la nuit parce qu'il avait l'habitude, étant insomniaque, d'appeler à 5 heures du matin. L'imprimeur n'était pas payé, ni les avocats, les créanciers faisaient antichambre, les procès en diffamation pleuvaient, personne ne savait de quoi serait fait le prochain numéro.
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