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Critique de Franz


Les promontoires de l'esprit.
Poète lucide, exigeant et courageux, « l'intelligence tremble à l'approche de l'être nu » comme l'écrit Kenneth White, Pierre Cendors s'avance seul vers la péninsule d'Hornstrandir située au nord de l'Islande, des terres basaltiques âpres désertées des hommes, hantées par les renards polaires, que la falaise aiguë du Hornbjarg plongeant dans l'Arctique pourrait condenser. La voyance, cette acuité du regard allant au-delà des apparences et des préjugés, des visées utilitaires, affouillant jusqu'à l'os du paysage, Pierre Cendors la met en pratique, décrivant sa marche physique et sa démarche mentale : « Puis j'entrai dans la montagne », son arrivée au seuil d'un no man's land blanc hors du temps. La voyance et la vision se rejoignent et se confondent, amenant à une extase et une plénitude chamaniques : « Une immensité froide, ample lumière d'aube où rien ne meurt, rien ne vit… ». Il y a du Rimbaud parfaitement assimilé dans les écrits fervents de Pierre Cendors mais aussi, en filigrane, toute une littérature liée au nomadisme intellectuel chère à Kenneth White mais l'auteur, dans son « Carnet islandais », fait oeuvre personnelle à part entière. Son écriture exigeante et pourtant lisible, compréhensible car ancrée dans une réalité tangible est porteuse d'un feu intérieur qui se réfracte dans l'esprit du lecteur, confortant fraternellement ses propres visions. Le carnet islandais dépasse la simple relation de voyage. Magnus Morland, pseudonyme et auteur fictif (hétéronyme), parcourt le livre, l’émaillant de commentaires. Le voyage résonne ainsi en écho dans les profondeurs de l’imaginaire et sonne avec justesse, sans pesanteur aucune. Le concept de « paysage-racine » esquissé est d’une justesse troublante comme si chacun portait déjà en soi un paysage « natal » qui révèlerait, à des « points de jonction géographique », « l’invisible dehors ». L’absence donnant corps à la vision, le livre est dédié à l’artiste islandais Georg Gudni (1961-2011) qui a su peindre des paysages archétypaux « ouverts sur l’infini ».
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