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Critique de 5Arabella


La gloire du Don Quichotte est telle, qu'elle a eu tendance à repousser dans l'ombre tout le reste de l'oeuvre de Cervantes. Peu de gens savent qu'il écrivit aussi de nombreuses pièces de théâtre. Il en fit représenter un grand nombre à Madrid entre 1581 et 1581, dont deux seules sont parvenues jusqu'à nous, dont ce siège de Numance. Mais il a continué à en écrire, et en 1615, donc un an avant sa mort et après la parution de Don Quichotte, il publie un recueil de 8 pièces et quelques intermèdes, ce qui montre à quel point il tenait à cette partie de son oeuvre. Une longue préface expose sa vision du théâtre et dit tout son attachement à ce genre. Il ne s'est toutefois jamais imposé comme un auteur dramatique de son temps, son théâtre a été d'une certaine manière atypique, très éloigné de la comedia nueva de Lope de Vega qui a triomphé à la fin du XVIe et au XVIIe siècle et que Cervantes a vilipendée.

Le siège de Numance est peut-être la pièce la moins oubliée dans la production de Cervantes. Elle semble avoir été créée entre 1581 et 1587, sans qu'il semble possible d'être plus précis dans la datation. Il s'agit d'une tragédie historique, qui se base sur des faits réels, le siège de la ville de Numance qui finit par être prise par les Romains commandés par Scipion Émilien en -133. Ce siège a un caractère en partie mythique : les habitants auraient préféré un suicide collectif plutôt qu'une capitulation. Cela en fait un épisode héroïque exemplaire, susceptible de frapper les esprits, provoquer de l'émotion et faire surgir un esprit patriotique exacerbé. Cet épisode historique a été exploité par d'autres auteurs espagnols, en particulier au XIXe siècle. La pièce de Cervantes a connu des représentations, après des adaptations, y compris en France.

La pièce est en quatre journées et comporte un très grand nombre de personnages. Scipion veut à la fin d'un siège interminable, la victoire, et pouvoir obtenir un triomphe à Rome. Il ne laisse rien au hasard, veut minimiser les risques et les pertes. Il encercle la ville, pour empêcher les habitants de sortir, et compte sur la faim pour gagner, voulant éviter de se battre en perdant des hommes. Nous passons successivement du camps romain à la ville assiégée, dans laquelle les habitants continuent à espérer, à vivre et à aimer. Mais les conditions de vie deviennent progressivement de plus en plus insoutenables, les gens meurent de faim. Malgré des exploits et le dévouement, la fin devient inévitable, et les habitants choisissent la mort plutôt que le déshonneur et la servitude. Ce qui va empêcher Scipion d'obtenir son triomphe pour lequel il aurait eu besoin de captifs qu'il aurait pu amener à Rome, ce dont le frustre le suicide des habitants.

C'est assez statiques et prévisible, mais cela ne manque pas d'une forme de grandeur. Au final il y a quelque chose du théâtre antique, dans le déroulé d'une tragédie dont tout le monde connaît la fin, sauf les protagonistes, qui espèrent et luttent malgré tout. le grand nombre de personnages et l'accumulation d'épisodes parfois brefs rendent toutefois difficiles une représentation.
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