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Critique de laurenremark


Refermer une série, c'est toujours une émotion particulière. Déjà, parce que depuis 6 ou 7 ans cela ne m'est que rarement arrivé, une malédiction récurrente chez les libraires. Mais parfois il y a des textes, des auteurs, des circonstances. Je pense que peu importe, libraire ou pas, j'aurais continué Capitale du Sud. Parce qu'il y a ce parfum de chez moi, cette influence méditerranéenne dont je ne saurai probablement jamais me départir. Parce que Gemina c'est toutes ces villes que j'ai chevillées au corps, dans ses moments de pure grâce comme dans son quotidien bien moins reluisant. Ici, là-bas, comme sur un plateau de Tour de Garde, on joue avec nos règles propres et on passe pour des fous auprès de ceux qui viennent du Nord.

Mais revenons au Contes Suspendus, troisième et ultime tome de Capitale du Sud, par Guillaume Chamanadjian. J'éviterai tout résumé forcément spoilant, mais ce 3ème tome réussit une belle synthèse des deux premiers, tissant les motifs du premiers, gardant la tension du second, alliant aventure et complots politiques avec brio. Si Guillaume Chamanadjian nous avait démontré qu'il savait manier ces deux pôles, je trouve dans l'écriture une poésie plus fine et présente encore que dans les deux précédents volumes.

Finir une série n'est pas chose aisée et j'ai trouvé que ce volume concluait parfaitement la trilogie, rejoignant celle de Claire Duvivier, Capitale du Nord, réussissant le petit tour de force d'emprunter des personnages sans en rendre la lecture obligatoire, d'incarner leurs voix (facile néanmoins quand Claire est à côté !) et de leur laisser l'espace pour être développés dans le dernier tome de Capitale du Nord et ultime tome de la fresque de la Tour de Garde. J'ai été particulièrement satisfaite de voir se boucler indépendamment la série sans empiéter sur celle du Nord, j'avais du mal à imaginer comment ce serait fait, mais la gestion est parfaitement exécutée pour moi. Néanmoins, parce qu'elle est elle aussi brillamment exécutée, je ne peux que recommander de lire les deux premiers tomes de Capitale du Nord avant de vous lancer dans celui-ci.

Il y aura eu tout ce que j'attendais de cette fin : l'intrigue se résout pour les personnages, les mystères sont élucidés, et la fin m'a été douce amère, comme je l'aime. le coeur de Gemina comme de la trilogie était de parler de transmission orale, écrite, de ces histoires protéiformes et de leur emprise sur notre identité collective comme individuelle. Une ambition pleinement incarnée et exécutée.

Cette double série aura réussi à me démontrer que la fantasy française avait encore bien des choses à m'offrir, qui touchent à ce que la fantasy américaine lissée de ses dernières années n'aura pas forcément réussi : à parler à mes origines et mon identité, à ce fond de culture qui ne nous quitte jamais vraiment même quand on migre plus au nord ou à confondre celleux qui partagent nos vies, nous poussant à mettre du savon dans les placards ou des épices dans tout ce que l'on mange. On parle de plus en plus de fantasy "asiatique" ou "moyen orientale" mais j'avoue que si j'en suis la première amatrice, cette fantasy de l'Europe du vin et de l'huile m'est particulièrement chère.

De Gemina à la Tour de Garde j'aurai salivé, pleuré parfois, angoissé beaucoup et espéré aux côtés d'un certain gourmet sympathique que me manquera diablement. Et si je quitte avec beaucoup de nostalgie Nox, je me réjouis d'avoir ajouté ma petite pierre à ce bel édifice (quelle émotion ces remerciements, je ne saurai encore en parler) et continuerai à assommer celleux autour de moi qui ont le mauvais goût de ne pas encore s'être lancés dans un formidable voyage à ses côtés.

"Il n'y a pas de terme à certains contes. Seulement des débuts. Des commencements. Des origines. le conte a une vie propre. Il vit et meurt. Il n'est rien sans le conteur, et le conteur n'est rien, tout court."
Merci Guillaume, d'avoir si brillamment conté.
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