AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de tiptop92


Françoise Chandernagor - L' Allée du Roi -1981 : Ceux qui ont des adolescents comprendront la référence mais n'est-on pas dans ce livre en plein dans "Les anges de la télé-réalité" ou dans la première monture d'un "Loft story" permanent qui remplacerait les jeunes indigents habitués de ces émissions par des ducs et des comtesses emperruquées ? Car sincèrement à part l'absence de caméras tout se rapportait comme dans ces émissions à des intrigues amoureuses ou sociétales frappantes par leur superficialité. Ces fausses mémoires très bien documentées nous contaient par le menu la vie oisive de quelques nobles riches ou moins argentés, coureurs de distinctions et de pensions sonnantes et trébuchantes. Françoise d'Aubigné (la future madame De Maintenon) elle-même malgré son sang bleu n'avait pas le sou, son père escroc à la petite semaine étant emprisonné depuis sa naissance sur ordre du tribunal royal. Pour survivre elle se résignait alors à épouser le poète et écrivain Paul Scarron, un pauvre hère de trente ans son aîné diminué par une terrible infirmité mais à l'intellect toujours parfaitement aiguisé. A la mort de son mari seule et presque à la rue, elle obtenait grâce à des fréquentations choisis (C'est un art quand on ne travaille pas de connaître les bonnes personnes) un poste de gouvernante des enfants de la Montespan et de louis XIV. Femme d'esprit avant tout, d'une beauté altière elle séduisit le roi au point que celui-ci devenu veuf la choisit au milieu de ses multiples maîtresses comme seconde épouse. Ces mémoires apocryphes prenaient à ce moment-là tout leur sens en nous introduisant dans le quotidien du plus célèbre des rois de France. Plus on avançait dans la chronologie du règne, plus l'existence de la famille royale prenait un tour dramatique. La mort du dauphin, de la dauphine puis des petits enfants du roi frappés tous par d'épouvantables maladies faisait peser une lourde mélancolie sur un texte qui prenait enfin de l'épaisseur. Malgré tous ces malheurs la royauté ne renonçait pas à ses fastes démesurés. Il fallait constamment donner le change et ce même si le peuple crevait de faim désespéré par des années de famines et de guerres inutiles. Il y avait dans cette misère qui bouleversait tant madame De Maintenon les germes d'une révolution qui éclatera cent ans plus tard quand le peuple sera à bout de tous les privilèges En faisant parler madame de Maintenon l'auteure jouait la carte de la proximité cassant au passage quelques lieux communs sur cette femme bien loin de la personne froide et rigide que voulaient nous montrer les images d'Epinal. Ce roman d'une vie naviguait entre futilité et importance historique suivant sans doute la provenance et la véracité des documents retrouvés. On sait par exemple que la marquise brûla une grande partie de sa correspondance (celle avec le roi plus particulièrement) et que la plupart des faits racontés ont été rapportés par des tiers. le génie de Françoise Chandernagor fut d'arriver à nous faire croire même dans les moments qu'elle avait inventé que tout sortait du cerveau fatigué d'une femme qui de son propre aveu avait vu trop de choses et vécu trop longtemps. Consciente du poids politique et historique qu'auraient pu avoir ses souvenirs, madame De Maintenon emportait ses vérités dans sa tombe laissant à des écrivains comme Françoise Chandernagor la possibilité de deviner en recoupant des témoignages extérieurs et les quelques courriers personnels pas encore détruits ce qu'elle aurait pu dire de sa vie... une bien belle digression en tous cas
Commenter  J’apprécie          13619



Ont apprécié cette critique (125)voir plus




{* *}