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Critique de PrettyYoungCat


Quel récit étrangement composé !
Le titre accrocheur et percutant m'a laissé suggérer qu'il s'agissait d'un témoignage sur l'inceste sous forme d'auto-fiction. J'ai pensé aussi que l'auteure s'attacherait à faire des liens avec la psychogénéalogie.
Et me voilà perplexe, déconcertée...

La première partie, bizarrement tirée en longueur, nous narre de manière romancée le comportement braconnier d'un aïeul durant la guerre à la fin du 19ème siècle...
Le chapitre suivant prend un ton factuel et nous amène à une cousine éloignée qui interpelle Sophie Chauveau sur l'inceste perpétré par son oncle et toutes deux observent les similitudes de leur vécu, puisque l'auteure, elle, a subi l'inceste infligé par son père...
Quelques chapitres nous décrivent toujours factuellement l'arbre généalogique et la longue série de membres de la famille incestueux. Leur "enquête" est une sorte de recensement, sans qu'une réflexion approfondie soit véritablement entreprise quant à ce troublant (et dérangeant !) phénomène de répétition.
Ensuite, l'auteure couche sur le papier comme couchée sur le divan d'un psychanalyste, les turpitudes de son père, le climat incestueux perpétuel, même aux yeux de tous, et loin de susciter la protection de sa mère, cette dernière banalisant au contraire ces attouchements inappropriés. Pis, elle se montre jalouse de sa fille pour laquelle son mari éprouve plus de désir...

Tout suinte l'infect, le sordide, l'impunité, la perversion. On ressent énormément à l'écrit que Sophie Chauveau a percolé chaque événement ou parole chez le psy. Tout est très analysé, intellectualisé, réfléchi, mis à distance. Pourtant c'est comme si tout n'avait pu filtrer et que des résidus toxiques demeuraient. Comme si l'auteure n'avait pu encore tout à fait métaboliser au-delà de la colère et que la plaie était finalement restée béante. Cela se conçoit évidemment, mais l'auteure achève son propos en se disant "guérie" de tout ça, qu'elle a pu pardonner, à elle-même surtout (car on le sait, les victimes portent la honte que devrait ressentir leur bourreau) et avoir pu se réinventer. Personnellement, j'ai des doutes, mais qui suis-je pour le dire.

Bref, cette lecture m'est apparue comme une sorte de règlement de compte familial et je me suis demandé si en l'état ce témoignage était arrivé à maturation et si en tant que lecteurs, nous ne nous trouvions pas mis à l'état de voyeurs. Quelque-chose m'a mise mal à l'aise, un peu comme si j'écoutais à la porte du cabinet du psychologue...

Je ressors en outre interloquée par la narration polymorphe et par ce qui se dégage à la fois de si intime et de si distancié, froid dans son expression.
Est-ce un récit qui manque de pudeur, à la manière de son père qui se promenait nu dans la maison avec ses mains baladeuses... Inconsciemment sans doute.
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