Citations sur Pense à ceux que tu aimes... (15)
- Tout va bien, Cassie ?
Je fixai l'enveloppe.
- J'ai connu des jours meilleurs.
- Et je peux faire quelque chose ?
Quand Audrey était un nourrisson, il avait posé la même question. Et quand je lui ai répondu qu'en effet, il pouvait faire quelque chose, il s'était défilé. Après toutes ces années, j'aurais dû être en mesure de lui pardonner, mais je n'étais pas très douée pour ça. La colère était un sentiment plus facile à éprouver et ressemblait moins à de la faiblesse. C'est ce qui restait de mes années folles, j'imagine.
Je n’étais pas bonne en calcul, mais je me défendais en sciences naturelles. Et je savais que, pendant que je respirais tout l’oxygène disponible, j’expirais en même temps du gaz carbonique qui allait bientôt rendre l’air autour de moi irrespirable. Ma respiration et mon rythme cardiaque allaient se raréfier, jusqu’à l’asphyxie, la perte de connaissance, et bientôt la mort. Combien de temps me restait-il ? Peut-être vingt minutes. Peut-être moins.
La haine me frappa avec tant de force que je faillis en perdre l’équilibre. Je vais sauver Leo et tuer les deux personnes qui se trouvent dans cette pièce.
J’écartai cette pensée. Ce n’était pas moi. Je n’étais pas une meurtrière. Je sauvais des vies. Je ne les prenais pas. Je tentai de m’accrocher à des lueurs d’espérance, mais la méthode avait fait son temps et était à présent aussi usée qu’un pardessus rêche que l’on enfile machinalement alors qu’il pèse une tonne.
Mais vous savez ce qui fait un bon flic ? Un bon flic n’a pas d’a priori. S’il voit un type en train de pousser une voiture dans la rue, il ne présume pas qu’il est tombé en panne. Il se peut tout aussi bien qu’il ait volé la bagnole. Alors vous arrêtez le type et vous lui demandez ce qui se passe. C’est pour ça que je vous le demande. Est-ce que c’est un problème de garde d’enfant ?
J’agissais d’instinct. Réfléchir était un luxe qui aurait risqué de mettre en danger mes enfants. J’embrayai et appuyai sur l’accélérateur. Je pris l’allée, puis retrouvai la route juste à temps pour apercevoir la voiture qui disparaissait dans un virage.
Je ne connais rien de plus lugubre que l’imagination des parents. On commence par craindre que nos enfants ne voient jamais le jour, mais c’est encore pire lorsqu’ils commencent à vivre en dehors de notre ventre, en dehors de notre protection permanente. C’est à ce moment-là que notre imagination devient débordante, et dans le mauvais sens du terme. On est persuadés qu’ils vont s’étouffer dans leur berceau, disparaître du jardin d’enfants ou mourir d’une overdose dans la chambre de leur meilleur ami.
Mais une meuf qui couche avec le mari de quelqu’un que j’aime bien ou qui le raconte partout, et bien pour moi, c’est une pouffe, et c’est tout.
Les petits secrets font les grands mystères, et un beau jour votre époux disparaît et le crédit de la maison n’est plus honoré.
Je récapitulai les méthodes que j’avais apprises pour maîtriser les animaux enragés. En ultime recours contre un chien qui vous attaque, il faut tenter de le frapper à la gorge, à la truffe ou derrière la tête. Avec les pieds ou les poings. Chercher une arme. Briser des os. Mais je me rendais bien compte que si j’en arrivais là, ce seraient mes os qui seraient brisés. Et moi qui serais poignardée. Je ramassai un caillou et le soupesai. Je le lançai dans sa direction, en essayant d’éviter la pauvre fille, mais le projectile atterrit dans un tapis de feuilles, à plusieurs centimètres de sa cible.
Mais, alors que je m’approchais, les choses se précisèrent. Un homme et une femme se trouvaient dans le faisceau de mes phares. Ils se disputaient. Non. Ils se battaient. Sam et moi nous disputions souvent. Mais ce à quoi j’assistais n’avait rien à voir. C’était une vraie bagarre, faite de poings serrés, de rage, de poussées violentes, et, pour cette raison, la jeune femme brune en legging n’avait aucune chance de prendre le dessus.